Dossier d’œuvre architecture IA60003211 | Réalisé par
Rat-Morris Viviane (Rédacteur)
Rat-Morris Viviane

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France.

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  • enquête thématique régionale, Villégiature et tourisme en Hauts-de-France
Ancienne villa Sainte-Anne, puis Château Sainte-Anne, puis maison de repos, puis maison familiale de vacances dite la Cité Joyeuse, actuellement château de Jonval
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Hauts-de-France - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Communauté de communes des Lisières de l'Oise - Compiègne-Sud
  • Commune Pierrefonds
  • Lieu-dit Le Beaudon
  • Adresse 2 rue Séverine , chemin de la Forêt
  • Cadastre 2020 B 242, 243, 2305  ; 1838 B2 B342 à 344, B346 à 348, B350, B351, B 410 B342 (en partie), B343 (en partie), B344 (avec une maison au pied du coteau), B346, B347, B348, B350 (avec une maison au pied du coteau), B351, B410 (en partie).
  • Dénominations
    villa, colonie de vacances
  • Précision dénomination
    maison de repos
  • Appellations
    Château Saint-Anne, Château Jonval, Cité joyeuse
  • Destinations
    demeure, colonie de vacances
  • Parties constituantes non étudiées
    parc, communs, chapelle

Aux origines de la villa Sainte-Anne, 1864-1881

Dans son article "La féodalité à Pierrefonds. XIVe siècle– XVIIIe siècle" (2015), le journaliste Laurent Kokanosky identifie un fief de Champbeaudon au XIIe siècle sur le coteau nord de la vallée du Berne à Pierrefonds. S’y dresse au début du XVIIe siècle un petit manoir habité par le seigneur du fief.

Ce manoir ne figure pas sur le plan cadastral de 1838. À cette époque, des parcelles boisées et cultivées dévalent le coteau. Deux sont bâties : chacune présente une maison en bordure du chemin du Beaudon (actuelle rue Séverine). L’Atlas d’alignement des rues de 1863 mentionne que ces parcelles appartiennent à des familles pétrifontaines de tisserands, manouvriers et travailleurs du bois (Melaye, Cuvillier, Fauvel et Vagnier). Sur chacune des deux parcelles les plus à l’ouest (appartenant aux familles Melaye et Cuvillier) se trouve une maison en alignement sur la rue du Beaudon. 

Le 26 octobre 1864, Alfred Louis Bujeon (parfois orthographié Bugeon), médecin demeurant à Pierrefonds achète les terres et bâtiments à ces familles prétrifontaines de tisserands, manouvriers et travailleurs du bois (Cuvillier, Fauvel, Wargnier, Desmarest, Dollé, Cécille, Vézel, Ferté, Duchemin, Noël, Constant, Devillers). Les parcelles sont situées à flanc de coteau et limitrophes de la rue du Beaudon, de la sente du Parc et de la sente du Diable (AD Oise. 4QP3/3893, n°18). Il poursuit ses achats jusqu’en 1871 et constitue ainsi une propriété de plus de 140 ares comprenant des maisons, des petits bâtiments, jardins, murs, talus, cours, fontaines, et divers terrains. Sur cet espace, il supprime la plupart du bâti et édifie une villa possiblement sur la base de ruines médiévales (archives de la CRMH).

Une photographie de Louis-Joseph Deflubé réalisée entre 1864 et 1870 montre une grande villa construite à mi-hauteur sur le coteau. La photographie révèle une construction compacte avec un avant-corps saillant à trois pans en façade, édifiée sur quatre niveaux dont un soubassement semi-enterré et un comble mansardé. Le rez-de-chaussée est desservi par une terrasse en galerie le long de sa façade sud, de plain-pied avec le jardin en façade nord. La parcelle est déboisée et aménagée par des pelouses autour desquelles s’enroulent des allées qui semblent ensablées. Quelques arbres solitaires ponctuent le jardin. Ce dernier est clos et un chemin longe la clôture en grimpant droit dans la pente du coteau.

Le 28 novembre 1881, Alfred Louis Bujeon cède la propriété à la SA des Chemins de fer du Nord (AD Oise. 4QP3/3893, n°18). Cette société acquiert à l'époque de nombreuses propriétés pour réaliser la voie ferrée de la ligne d’Amiens à la Vallée de l’Ourcq. Le plan parcellaire des terrains à acquérir, réalisé en 1881, montre un plan masse de la villa dans son parc dont les allées sont dessinées (AD Oise. 5S979). D'autres plans du projet représentent la propriété, constituée d’un grand parc à flanc de coteau, fermée d’un mur le long de la rue du Beaudon, avec un large portail en contrebas et quatre accès secondaires en haut de la propriété. Le parc est parcouru de nombreuses allées et escaliers sinueux. Une fabrique (au moins) est repérable dans la partie supérieure du parc. Dans la partie inférieure, au sud-est, un bâtiment de plan rectangulaire jouxte un bassin protégé par des murs de soutènement. La villa s’élève au milieu du parc et donc du coteau, édifiée sur un plan rectangulaire compact avec un pavillon central au sud (coté lac) et un perron au nord (coté forêt). Le projet des Chemins de fer du Nord prévoit de réaliser une tranchée pour permettre le passage de la voie ferrée, ce qui suppose d’amputer la propriété d’un tiers de son parc, de son bassin et du bâtiment situé à côté.

 

De la villa au château Sainte-Anne, 1881-1914

Les matrices cadastrales des propriétés non-bâties de 1882-1911 notent que trois maisons sont démolies dans la propriété cédée par M. Bujeon à la Compagnie des Chemins de fer du Nord.

En 1885, peu après avoir inauguré la nouvelle liaison ferroviaire, la Compagnie revend la propriété. Elle est alors amputée d’environ un tiers sur la surface initiale de son parc. Elle est acquise par Barthélémy-Madeleine-Alfred comte Bohrer de Kreuznach et son épouse Marguerite Brossier de La Roullière, propriétaires à Paris et habitués de la saison estivale à Pierrefonds. Le descriptif succinct de la vente est rédigé comme suit : "le château proprement dit, le terrain dans lequel il se trouve, la source d’eau vive qui l’alimente et le terrain conduisant de la ruelle du Parc à la propriété" (AD 60. 4QP3/3893, n°18). Bohrer de Kreuznach acquiert peu après quelques terrains limitrophes de la propriété. Il est possible qu’il commande l’aménagement du parc à Édouard Redont (1862-1942), paysagiste de Reims, primé à l’exposition universelle de 1900 (annonce publicitaire parue dans La Dépêche coloniale illustrée du 31 décembre 1902). De 1888 à 1904, la villa est dénommée "villa Sainte-Anne" dans la Gazette de Pierrefonds-les-Bains, sans qu'on en connaisse la raison.

Le 29 mai 1902, Louis Henri Rogelet (1849-1945), propriétaire rentier à Reims, achète la propriété de plus de 90 ares, constituée par "une villa, dite Villa Sainte-Anne, sise à Pierrefonds-les-Bains, rue du Beaudon ou chemin numéro quatre-vingt-cinq de Pierrefonds à Saint-Jean-aux-Bois, bâtie en pierre de taille avec couverture en ardoise et élevée sur caves, composée : au sous-sol, cuisine, grand vestibule, buanderie, grande cuisine, office, cabinets d’aisance, caves, remises et calorifère. Au rez-de-chaussée communiquant avec le sous-sol par un petit escalier, grand vestibule, salon véranda, petit salon, salle à manger, office, chapelle. Escalier. Au premier étage, vestibule, quatre chambres avec cabinets de toilette, cabinets d’aisances. Au deuxième étage, vestibule avec trois chambres et trois cabinets de toilettes, lingerie, deux chambres de domestique, cabinets d’aisances. Grenier, parc, potager, verger. Près de l’entrée, maison du concierge, écurie, remises avec cave dessous sur un côté seulement. L’ensemble fermé par devant par un mur, des autres côtés et au fond par des haies appartenant à la propriété". À cela s’ajoute une "source d’eau vive qui alimente la propriété". L’ensemble est délimité par la rue du Beaudon, l’escalier de la sente du Point de Vue, le hameau du Parc, la sente du Parc et deux propriétés à l’ouest (AD Oise. 4QP3/3893, n°18).

M. Rogelet fait de grands travaux d’agrandissements de la villa, réputés achevés vers 1905-1908 (archives de la CRMH et BEAUVY, 2015). Il agrandit un bâtiment sur la rue du Beaudon pour en faire de grands communs, ajoute deux ailes à la villa ainsi qu’une galerie inspirée du château de Fère-en-Tardenois (Aisne) et une chapelle inspirée de celle du château Chantilly (Oise). Ces deux derniers éléments sont ainsi bâtis dans un goût manifeste pour l’architecture de la Renaissance.

La demeure est réputée confortable et semble servir tout autant à M. Rogelet qu’à la villégiature de ceux qui la louent à la belle saison, sous l’appellation "château Saint-Anne".

Occupation pendant la Grande Guerre, 1914-1918

Les archives de la CRMH indiquent que la villa est occupée pendant la Première Guerre mondiale par l’état-major allemand dont les troupes occupent la ville en 1914.

François Digues (2010) et François Beauvy (2015) précisent que la villa fait ensuite partie du dispositif de l’hôpital qui s’implante à proximité du front à Pierrefonds. Isabelle Lemesle (2008) note que la villa accueille au départ des officiers en repos et que c'est à partir de l’été 1918 que des blessés y sont également logés.

Les archives de la CRMH mentionnent que le jardin reçoit des obus au cours du bombardement de juin 1918. La propriété sort donc dégradée du conflit.

 

Sainte-Anne devient de Jonval, 1924-1934

Louis Henri Rogelet, demeurant désormais à Dijon, cède la propriété les 5 et 6 mars 1924, en jouissance rétroactive dès le 1er janvier, à Pierre-François comte de Failly (1863-1942), demeurant à Paris. Ce membre de la branche ainée des Failly se rapproche ainsi de la branche cadette, liée au général de Failly, aide de camp de Napoléon III, qui avait une résidence dans la propriété voisine de Cuise-la-Motte, le château de La Chesnoye.

La propriété pétrifontaine est cédée avec ses dommages de guerre. L'acte de vente décrit ainsi le château Sainte-Anne :

"Premièrement Maison d’habitation composée de :

- au sous-sol : salle de chauffage central, de repassage, du tableau d’électricité, fruitier, cuisine,

- au rez-de-chaussée : grand et petit salon, grande et petite salle à manger, bureau, office avec monte-plats,

- au premier étage : cinq chambres à coucher, grand cabinet de toilette, salle de bains,

- au deuxième étage : six chambres à coucher, lingerie,

- grenier, trois water-closets dans la maison avec chasse d’eau.

Deuxièmement : chapelle construite sur une salle de billard et communiquant avec le premier étage par un passage vitré.

Troisièmement, vastes communs, comprenant :

- au-rez-de-chaussée, logement du concierge, buanderie, écuries, remises, salle de moteur,

- au premier étage, chambres des domestiques,

- grenier.

Quatrièmement : Jardin potager et d’agrément, parc." (AD Oise. 4QP3/4588, n°29).

Une carte postale (non-datée) semble représenter la propriété pendant l'entre-deux-guerre : le château s'élève dans son parc boisé d’arbres de haute-tige de différentes essences ; de buissons ornementaux qui bordent le terrassement au pied de la façade sud de la demeure ; d'arbustes au feuillage persistant grimpant sur le coteau au pied de la chapelle. Un poteau électrique sur la droite de l’image signale l’électrification de ce secteur de la commune.

Aucun élément ne permet de déterminer quand le château Saint-Anne est devenu le château de Jonval. Le glissement semble se faire naturellement dans les sources. Il est à noter que la famille de Failly a résidé un temps dans son château de Jonval, dans le village du même nom dans les Ardennes. Ce dernier château est réputé être sorti tout à fait ruiné par la Première Guerre mondiale.

 

Du château de Jonval à la Maison du dentiste, 1934-1940

En 1934, la famille du comte de Failly doit se défaire de la plupart de ses biens. La famille cède le château en décembre 1934 à la société anonyme Dentifrice Bi-Oxyne, représentée par son président François Ferrand (1877-1953) (AD Oise. 753W27499).

François Ferrand, dentiste et industriel, réside alors au Portique Palestrina (IA60003209) à proximité du château de Jonval. Il acquiert la propriété pour en faire une "Maison du dentiste" devant servir de lieu de repos aux membres de la profession d’après François Digues (2007) et Rémi Hébert (2015). Ce dernier précise que François Ferrand place alors la chapelle sous le vocable de "sainte Apolline", patronne des dentistes.

Le nouveau propriétaire aménage les intérieurs du château au goût du jour, en en améliorant le confort et en l’adaptant à l’accueil du séjour de ses hôtes.

En réponse à l'occupation des lieux par les troupes allemandes en 1940, des témoignages sont recueillis pour décrire l'état des lieux avant leur arrivée. Ainsi, la société Bi-Oxyne décrit l’immeuble dans un courrier adressé au maire de Pierrefonds (qui recense les demandes d'indemnisation) le 9 août 1941 : "L’immeuble a deux étages et comprend : 14 chambres entièrement meublées (lits garnis, sièges, armoires, lavabos avec eau courante) ; 1 salle de bains ; 1 salle à manger avec tables, chaises, buffets, dessertes ; 1 petit salon (entièrement meublé) ; 1 grand salon (entièrement meublé) ; 1 cuisine entièrement agencée ; 1 chambre froide avec système de réfrigération ; 1 frigidaire ; caves diverses ; 1 chapelle attenante au bâtiment principal, avec sacristie, et au-dessus de la chapelle une grande salle de réception avec piano, billard japonais, meubles et sièges divers. En outre des communs se composant de 3 garages, 3 chambres de domestiques et dans une aile 2 autres chambres aménagées pour y recevoir des pensionnaires. Le tout entouré de jardins et en particulier d’un jardin potager. Nous vous rappelons que le Château de Jonval est une Maison de repos de la famille médicale et reçoit chaque année de nombreux pensionnaires. Il y a eu jusqu’à 30 pensionnaires à la fois et des banquets de 100 couverts y ont été organisés." (AD Oise. 68W6).

Le château dégradé par les Allemands puis par les Américains, 1940-1945

Les archives de la CRMH précisent que la demeure est réquisitionnée pendant la Seconde Guerre mondiale et subit de gros dégâts. Cela est dû aux occupations successives par l’armée allemande en 1940-1941, puis par des réquisitions pour des industriels allemands, belges et néerlandais, puis à nouveau par les troupes allemandes en 1943-1944, enfin par les soldats américains en 1944-1945 (AD Oise. 753W27499).

L’examen des dossiers de dommages de guerre après 1944 (AD Oise. 753W27499) et de demande d’indemnisation suite à réquisition par les forces alliées (AD Oise. 155W20/123) révèle le peu de soin des occupants. Les cheminées, parquets, lambris et tentures des pièces de réception, des chambres et des couloirs sont pour la plupart à réparer. Une partie non-négligeable des boutons de portes, serrureries et plomberies est dégradée ou manquante. De nombreux vitrages et faïences sont cassés. Les escaliers présentent des usures anormales. Le chauffage central et les fourneaux de la cuisine sont inutilisables. L’ensemble est anormalement sale - aussi bien dans le château proprement dit que dans la chapelle et la salle de billard sous-jacente ou que des communs.

Les témoins pétrifontains attribuent aux Allemands les dégradations des installations électriques et téléphoniques, des boutons de portes, vitreries et faïences, tandis que la majeure partie des dégâts est attribuées aux soldats américains. Le mobilier est relativement épargné par l’intervention de François Ferrand qui en évacue une grande partie entre 1940 et 1942 (AD Oise. 155W20/123. Procès-verbal du 19 juin 1947 relatif au constat d’état du château de Jonval, à lire en annexe).

François Ferrand sollicite des dommages de guerre pour procéder à des réparations. Si des devis sont commandés, les travaux ne sont pas achevés lorsqu’il décide de se défaire d’une grande partie de ses biens et de ceux de la fondation liée à sa société Bi-Oxyne.

 

Une colonie de vacances, de 1952 aux alentours de 2000

Le 31 octobre 1952, la Société Dentifrice Bi-Oxyne vend le château de Jonval à l’association d'éducation populaire La Cité Joyeuse de Mazingarbe (Pas-de-Calais), représentée par l’Abbé Werquin (AD Oise. 753W27499).

La propriété est alors décrite : "Une propriété sise lieuxdits "Le Beaudon" et "Le Parc", appelé "Château de Jonval" et comprenant :

- Premièrement. Maison d’habitation composée de : sous-sol, salle de chauffage central, de repassage, du tableau d’électricité, fruitier, cuisine ; au rez-de-chaussée, grand et petit salon, grande et petite salle à manger, bureau, office avec monte-plats ; au premier étage, cinq chambres à coucher, grand cabinet de toilette, salle de bains ; au deuxième étage, six chambres à coucher, lingerie ; grenier ; trois water-closets dans la maison avec chasse d’eau.

- Deuxièmement. Chapelle construite sur une salle de billard, communiquant avec le premier étage par un passage vitré.

- Troisièmement. Vastes communs comprenant : au rez-de-chaussée sur rue, logement de concierge et cave à la suite ; au-dessus, buanderie, écuries, remises ; au premier étage : chambre de domestique, grenier.

- Quatrièmement. Jardin potager et d’agrément, parc.

[…]

- Cinquièmement. Terrain dans lequel se trouve une source d’eau vive alimentant la propriété dont il est séparé par la sente du Diable."

(AD Oise. 753W27499).

 

Les travaux de remise en état de la propriété n’ayant pas été achevés, les dommages de guerre n’ont pas été soldés et une partie est affectée au nouveau propriétaire. Aussi la poursuite des travaux va-t-elle transformer les lieux pour son nouvel usage. Au rez-de-Chaussée, un réfectoire est aménagé dans le grand salon, la salle à manger est conservée, un dortoir et une chambre sont aménagés. Au premier étage les chambres sont conservées et réaménagées. Pendant près de cinquante ans, l’association accueille des groupe d’enfants mais aussi de familles dans le château. Vers 2000, les travaux de mise aux normes nécessaires et les travaux d’entretien (maçonneries, couvertures...) dépassent les moyens de l’association qui se défait alors de la propriété (archives de la CRMH).

 

Vers un nouvel usage depuis le tournant du millénaire

Au tournant de 2000, la propriété du château de Jonval passe entre les mains d’un paysagiste russe qui souhaite y créer "un jardin avant-gardiste", selon Fanny Dollé dans un article du Courrier picard du 21 juin 2018. Le propriétaire entreprend d’importants travaux sur le château, les communs et surtout dans le parc. L’achèvement du jardin semble cependant avoir été retardé par la pandémie de covid-19 de 2020-2021.

Situation

Le château Jonval domine le lac de Pierrefonds depuis le coteau nord de la vallée. Il est situé au cœur d’une parcelle pentue aménagée en parc. Du fait du contexte sanitaire et des travaux en cours entre 2019 et 2021, la propriété n’a pas pu être visitée mais seulement observée depuis le domaine public.

 

Le parc et la clôture

Le parc, transformé à plusieurs reprises, adopte un plan irrégulier sur une surface à forte pente. Il est planté d'arbres ornementaux isolés, d'arbustes ornementaux taillés en moutonnement et présente de vastes pelouses entrecoupées d'allées sinueuses.

L’ensemble est clos au sud et à l’est par un mur en pierre maçonnée de plus de 2 m de haut. Le mur sud est surmonté d’une balustrade jusqu’à un grand bâtiment de communs. Le mur de clôture surmonté d’une balustrade se continue le long de la rue. Il s’ouvre par une porte piétonne, près du grand bâtiment des communs, et par un portail encadré de deux piliers d’inspiration dorique, portant chacun un cartouche au motif de cuir retourné dans lequel est gravé la mention « JONVAL ». La clôture nord est formée d’un grillage, doublée ponctuellement de haie persistante.

 

Le grand commun

 Aligné sur la rue au pied du coteau, construit en pierre de taille et couvert d’ardoise, le grand commun est constitué de deux bâtiments séparés par un mur mitoyen saillant en toiture. Tous deux s’élèvent sur trois niveaux, rez-de-chaussée pour la partie ouest, soubassement pour la partie est, étage, comble aménagé éclairé de lucarnes et châssis de toit. Un pavillon, sur toute la hauteur de la construction, achève la partie ouest de l’édifice. Les deux corps de bâti montrent plusieurs traces de remaniement.

 

La résidence appelée château et sa chapelle

Construites elles aussi en pierre de taille et couvertes d’ardoise, la résidence, à l’ouest, et la chapelle, à l’est, sont reliées par une galerie fermée. Toutes deux adoptent une architecture éclectique d’inspiration Renaissance.

La résidence s’élève sur quatre niveaux : un soubassement semi-enterré, très ouvert en façade sud ; un rez-de-chaussée surélevé en façade sud et rez-de-jardin en façade nord ; un étage ; un étage de comble mansardé et éclairé de lucarnes en pierre. La résidence présente des façades rythmées en travées régulières.

Le plan est ramassé autour d’un corps de bâtiment à plan rectangulaire de cinq travées, avec une saillie centrale à pans coupés en façade sud. À l’ouest, une extension de trois travées est doublée, côté nord, par une tour quadrangulaire couverte en pavillon. L’extension ouest est achevée en rez-de-chaussée par un jardin d’hiver couvert d’une terrasse desservant le premier étage.

En façade sud, le rez-de-chaussée est desservi par une terrasse. À l’arrière, en façade nord, une porte lui donne un accès quasiment de plain-pied du rez-de-chaussée au jardin. La seconde travée ouest du premier étage accueille, devant une niche quasi-plate, une statue en ronde-bosse portée par une table en corbeau.

À l’est, une galerie couverte relie la résidence à la chapelle. Portée par une arche, elle est éclairée en façade sud et nord par six fenêtres en plein cintre. Sa composition semble être une citation du pont couvert du château de Fère-en-Tardenois (Aisne), construit à la demande d'Anne de Montmorency dans le deuxième tiers du XVIe siècle.

La chapelle est élevée sur deux niveaux : le soubassement éclairé de fenêtres et l'espace cultuel lui-même éclairé de vitraux. Elle est desservie au nord par une tourelle d’escalier, couverte d’un petit dôme supportant une lanterne, et à l’est par une petite sacristie, couverte en terrasse. La chapelle est composée d’une nef, couverte en pavillon surmonté d’une lanterne, et d’une abside, couverte d’ardoises. La nef est éclairée en façade nord d’une grande verrière, en sus des autres baies éclairant la nef et l’abside. Construite lors des agrandissements de 1885-1908 à l'initiative du comte Bohrer de Kreuzach ou du propriétaire suivant Louis Henri Rogelet, son architecture s'inspire directement de la chapelle néo-Renaissance du château de Chantilly (construite entre 1875 et 1885), constituant une seconde référence à un château ayant appartenu à la famille de Condé.

  • Murs
    • pierre pierre de taille
  • Toits
    ardoise
  • Plans
    jardin irrégulier
  • Étages
    étage de soubassement, 1 étage carré, étage de comble
  • Élévations extérieures
    élévation ordonnancée
  • Couvertures
    • toit à longs pans brisés croupe
    • toit en pavillon
    • toit polygonal
  • Escaliers
    • escalier de distribution extérieur : escalier tournant à retours avec jour en maçonnerie
  • Jardins
    arbre isolé, groupe d'arbres, massif de fleurs, pelouse
  • Typologies
    logis en coeur de parcelle
  • État de conservation
    bon état
  • Techniques
    • sculpture
    • ferronnerie
  • Représentations
    • balustre
    • pilastre
    • représentation figurative, être humain
    • pot
  • Précision représentations

    Les décors architecturaux citent à la fois le vocabulaire architectural classique pour le grand commun et la partie habitation du château et Renaissance pour la galerie et a chapelle.

    Ainsi la galerie couverte qui relie la résidence à la chapelle est une citation du pont couvert du château de Fère-en-Tardenois (Aisne), construit à la demande d'Anne de Montmorency dans le deuxième tiers du XVIe siècle. Et la chapelle est une référence à celle, néo-Renaissance, du château de Chantilly (Oise).

  • Statut de la propriété
    propriété privée
  • Intérêt de l'œuvre
    à étudier
  • Éléments remarquables
    demeure
  • Sites de protection
    site classé
  • Précisions sur la protection

    Construit sur une hauteur boisée voisine de la butte de sable, le château de Jonval domine le site de Pierrefonds. Le classement permet de protéger ce paysage particulier visible de l’ensemble du bourg et notamment du château médiéval.

Dès 1944, les lieux sont classés au titre des sites.

En 2019, le diagnostic patrimonial du plan local d’urbanisme intercommunal repère la propriété comme "demeure sur quatre niveaux en pierre de taille, toiture mansardée couverte d’ardoises, [avec une chapelle qui est un] édifice privé, bâti sur les ruines d’un ancien château médiéval, [des] jardins à l’italienne, [des] communs du château [formés par une] bâtisse en pierre sur trois niveaux en alignement sur rue [en continuité avec le mur de clôture qui s’ouvre par un portail marqués par des] piles en pierre, sculptés".

Documents d'archives

  • AD Oise. Série P ; PP 4316 - PP4317. Pierrefonds. Matrice cadastrale de l'état des sections, 1838.

    AD Oise : PP4317
  • AD Oise. Série P ; PP 4318. Pierrefonds. Matrices cadastrales, 1882-1911.

    AD Oise : PP4318
  • AD Oise. Série P ; PP4320 - PP4321. Pierrefonds. Matrices cadastrales, 1914-1936.

    AD Oise : PP4320 - PP4321
  • Archives départementales de l'Oise. Série 4 Q ; Sous-série P3 : 3893. Transcriptions hypothécaires n°18 (Bohrer de Kreuznach - Rogelet), 1902.

    AD Oise
  • Le Gaulois littéraire et politique. Paris.

  • Archives départementales de l'Oise. Série 4 Q ; Sous-série P3 : 4588. Transcriptions hypothécaires n°29 (Rogelet - De Failly), 1924.

    AD Oise
  • The New York Herald, 27 novembre 1926.

  • Excelsior : journal illustré quotidien : informations, littérature, sciences, arts, sports, théâtre, élégances, 3 juillet 1939, Paris, directeur de publication Pierre Lafitte.

  • Archives départementales de l'Oise. Série W ; Sous-série 68 W : 6. Demande d’indemnisation suite à réquisition par les forces d’occupation, 1941-1942.

  • Archives départementales de l'Oise. Série W ; Sous-série 753 W : 27499. Dommages de guerre après 1944, 1934-1953.

    AD Oise
  • Archives départementales de l'Oise. Série W ; Sous-série 155W : 123. Demande d'indemnisation suite à réquisition par les forces alliées, 1945-1947.

    AD Oise
  • AMH-DRAC Amiens. Dossier Château Jonval de Pierrefonds. Conservation régionale des Monuments historiques, [non-coté].

Bibliographie

  • BEAUVY, François. Le Siècle de Pierrefonds 1832-1914. Cuise-la-Motte : Le Trotteur ailé, 2015.

  • DIRECTION RÉGIONALE DE L'ENVIRONNEMENT, DE L'AMÉNAGEMENT ET DU LOGEMENT. Inventaire des sites classé et inscrits de l'Oise, [ca 2012-2013].

  • DIGUES, François. Histoire du village de Pierrefonds, tome 2. Pierrefonds : Mairie de Pierrefonds, 2010.

  • LEMESLE, Isabelle. Pierrefonds pendant la Grande Guerre, le quotidien du soldat en 1914-1918. Paris : Éditions du patrimoine, 2008.

  • DIGUES, François. Histoire du village de Pierrefonds. Pierrefonds : Mairie de Pierrefonds, 2007.

  • BARON, Pierre. François Ferrand (1877-1953), chirurgien-dentiste, entrepreneur, collectionneur et mécène. In XXVIe CONGRÈS DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D'HISTOIRE DE L'ART DENTAIRE [à Madrid] : Société française d'histoire de l'art dentaire, 2016, vol. 21. Actes du colloque.

  • CAUE de l'Oise. Diagnostic patrimonial de Pierrefonds en vue d'un Plan local d'urbanisme intercommunal, 2019.

Périodiques

  • DOLLE, Fanny. Le propriétaire russe du château de Jonval à Pierrefonds veut «créer un jardin d’avenir». Courrier Picard, 21 juin 2018.

  • Gazette de Pierrefonds-les-Bains. Compiègne : Société de Publicité et de renseignements / Imprimerie du Progrès de l’Oise. Années 1888-1904.

    Revue hebdomadaire puis bimensuelle publiée le dimanche pendant la saison thermale de Pierrefonds.

    AD Oise : PRSP1-PRSP2
  • HEBERT Rémi. François Ferrand (1877-1953) : un demi siècle de passion pour Pierrefonds. In Annales Historiques Compiègnoises : Pierrefonds, XVIIe-XXe siècles, n° 139-140, automne 2015. Compiègne : Société d'histoire moderne et contemporaine de Compiègne, 2015.

  • KOKANOSKY, Laurent. La féodalité à Pierrefonds, XIVè siècle – XVIIIè siècle. Histoires du Valois, Bulletin de la Société d’Histoire et d’Archéologie du Valois, numéro 4, 2015.

  • Ed. Redont. Architecte-paysagiste - Grand Prix. La dépêche coloniale illustrée, 31 décembre 1902.

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Documents figurés

  • Plan cadastral dit napoléonien de Pierrefonds, 1838, dessin à l'encre et aquarelle sur papier par Thorel, géomètre, 1838 (AD Oise ; Pp4902).

    AD Oise : Pp4902
  • Atlas du plan d’alignement de la commune de Pierrefonds, 1863. (AC Pierrefonds ; non coté).

  • Photographie négative de Louis-Joseph Deflubé, [ca 1864-1870] (Bibliothèque nationale de France, Réserve EI-96, boite Fol B - n° 10).

  • Compagnie du chemin de fer du Nord. Ligne d'Amiens à la vallée de l'Ourcq. Commune de Pierrefonds-les-Bains. Plan parcellaire et tableau indicatif des terrains à acquérir, plan, 1881 (AD Oise. Série S ; sous-série 5S : 979).

  • [Le château de Jonval à Pierrefonds], carte postale, [ca. premier tiers du XXe siècle], (coll. part.).

  • PATROUILLARD. Château vu du lac. Négatif noir et blanc ; Support verre ; Gélatino-argentique. © Ministère de la Culture (France), Médiathèque de l’architecture et du patrimoine, diffusion RMN-GP.

Annexes

  • Notice du clasement au titre des sites du Château de Jonval et son parc.
  • Archives départementales de l'Aisne, dommages de guerre, 155W20 / 123 – demande d’indemnisation suite à réquisition par les forces alliées : Procès-verbal de constat relatif au château de Jonval de la société Bi-Oxyne contre l’Etat du 19 juin 1947 : état des lieux a la levée de la réquisition d’occupation militaire
  • Archives départementales de l'Aisne, dommages de guerre, 155W20 / 123 – demande d’indemnisation suite à réquisition par les forces alliées : Procès-verbal de constat relatif au château de Jonval de la société Bi-Oxyne contre l’Etat du 19 juin 1947 : témoignage de Louis ferté, garagiste
Date(s) d'enquête : 2014; Date(s) de rédaction : 2014, 2020
(c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
Rat-Morris Viviane
Rat-Morris Viviane

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France.

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