Il fallait bien un préfet pour venir inaugurer les travaux de restauration de l’église Notre-Dame. Mercredi après-midi, une bonne partie du village s’était réunie au pied de l’édifice religieux. Non pas pour une procession, mais pour l’inauguration de l’église restaurée après dix ans de travaux et une enveloppe de 3 millions d’euros.

Pas peu fière Marguerite Lefebvre. Même un peu émue la première magistrate au moment de prononcer son petit discours. Faut dire que ce discours, elle a eu le temps de le préparer. Ce chantier de restauration de l’église Notre-Dame, ça fait quelques années qu’on en parle. « Quand je suis entrée au conseil municipal en 1977, on en parlait déjà, confie-t-elle. On avait sollicité le préfet de l’époque car des blocs de béton se détachaient de l’église ».

Demandes de démolition

Cet édifice, c’est toute une histoire. Il date de 1930 et a été conçu par l’architecte Jean-Louis Sourdeau. Il était censé remplacer l’église détruite durant la Première Guerre mondiale. Mais pas à l’identique car l’architecte de l’époque avait décidé d’innover en utilisant un matériau novateur : le béton armé. Le clocher contemporain est monumental (40 m de haut) et se voit à des kilomètres à la ronde. Le souci, c’est que la réalisation a un peu été faite à la va-vite (béton poreux, joints sous-dosés en ciment) et que son entretien n’a pas vraiment été suivi. Résultat des courses : l’église est devenue dangereuse avec des chutes régulières de béton. En octobre 1993, elle est fermée pour raison de sécurité. Elle ne rouvrira que vingt ans plus tard !

Par deux fois (en 1994 et 1999), le conseil municipal vote sa démolition. L’église trouvera son salut avec son classement au titre des monuments historiques en 2001. Un an plus tard, la tour du clocher est déconstruite. Pour sa reconstruction, un relevé 3D est effectué afin de faciliter la manœuvre. C’est Lionel Dubois, architecte des Bâtiments de France qui supervise ce chantier colossal. Les façades, chéneaux, gargouilles, portes et fenêtres sont également restaurés. De même que les vitraux qui inondent à nouveau de lumière l’édifice. Après dix ans de chantier, l’église Notre-Dame est désormais ouverte au public. Ce sont trois millions d’euros qui ont été investis dans ce chantier de restauration. L’État en a pris une grosse part (77 %, soit 2,3 M €). Le conseil général a apporté 20 % et la ville de Rocquigny a complété l’enveloppe de manière symbolique. « C’est rare que l’État mette autant d’argent pour une commune rurale, glisse Denis Robin, préfet. Mais cette église, c’est plus qu’un édifice religieux, c’est un élément central de l’identité de la commune. Cette église était un projet audacieux pour l’époque. Quatre-vingt-dix ans après, ça l’est encore. Sa reconstruction a été un sujet de débat dans la commune. Mais c’est un témoignage de l’histoire de notre patrimoine qu’il faut sauvegarder. Et cent ans après la loi relative à la protection des bâtiments historiques, cette restauration est un bel exemple. »

Denis ROBIN, La Voix du Nord, 5 octobre 2013.