Julien Daltroff fonde sur ce site une usine de broderie mécanique en 1875, probablement construite sur les plans de l'architecte Charles Chérier. L'usine est dotée d'une cantine en 1880, d'un logement patronal en 1882. En 1895, des logements ouvriers sont édifiés, ainsi qu'une salle des machines, une chaufferie, etc. La même année, Julien Daltroff acquiert l'ancienne filature de Lucy à Ribemont, à 20 Km à l'est de Saint-Quentin, qu'il reconvertit en usine de blanchiment, apprêt et tissage de tulle. En 1904, probablement lors du décès de Julien Daltroff, une nouvelle société est créée entre la veuve Daltroff, Alisa Bernet, et son fils Albert Jacob Daltroff, sous la raison sociale Veuve J. Daltroff et Cie. A cette date, la société exploite des ateliers de broderie mécanique en Suisse (Abtwyl, Berg et Gossau), en Autriche (Laustenau), et possède des maisons de vente à Londres, Vienne et Saint-Gall. A partir des années 1890, l'usine d'Harly est dirigée par un directeur, M. Boëtschi. A la veille de la Première Guerre mondiale, l'usine produit des broderies sur tissus de coton du "genre Saint-Gall", des broderies sur tulle et guipure du "genre Plauen", et des garnitures dites "nouveautés". L'usine, stoppée dès août 1914, est complètement détruite par les bombardements et les incendies entre le 3 et le 9 octobre 1918. Seules une partie des logements ouvriers, la cantine et quelques éléments mineurs de l'usine, pourront être restaurés tandis que les ateliers de fabrication et les bureaux sont reconstruits entièrement en 1920, pratiquement à l'identique, mais avec de nouveaux matériaux (le métal remplace le bois des sheds, etc). En 1921, la production redémarre, dans 5000 m2 d'ateliers neufs. L'usine de broderie mécanique, dirigée par M. Weiss, cesse toute activité entre 1934 et 1935.
Les ateliers sont repris vers 1936 et reconvertis en usine de matériel électrique industriel, spécialisée dans la fabrication de matériel basse tension, par la Société Industrielle et Technique pour l'Electricté (S.I.T.E.L.). Lui succèdent les Ateliers de Constructions Electriques de Delle (A.C.E.D.) vers 1950, puis en 1965 la société UNELEC, fondée par le groupe C.G.E. et Alsthom. Les ateliers sont agrandis à plusieurs reprises, en 1949, au milieu des années 1950 et en 1966. En 1986, la société UNELEC est absorbée par le groupe belge Vynckier. En 1995, UNELEC est acquise par le groupe américain General Electric. A partir de 1999, un processus de délocalisation des ateliers de l'usine d'Harly est enclenché.
Aujourd'hui, coexistent sur le site un laboratoire d'essai et des bureaux de la société GE - Power Controls, ainsi que les ateliers de la société MECA-ELEC.
A la veille de la Première Guerre mondiale, l'usine est dotée d'une machine à vapeur du constructeur suisse Sulzer de 120 ch., datée de 1892. Les ateliers sont alors dotés de 90 métiers à broder à pantographe, remplacés après 1918 par 20 métiers automatiques (munis de Jacquard) de 20 yards, et 5 métiers à pantographe de 10 yards pour les petites séries. En 1924, l'usine dispose de 35 métiers de 20 yards.
L'usine de broderie mécanique emploie 460 personnes en 1914 (365 femmes, 93 hommes, 3 contremaîtres). Au total, Daltroff emploie à Harly et Ribemont 600 personnes, sans compter les ouvriers façonniers travaillant à domicile. En 1922, les ateliers n'emploient plus que 150 ouvriers. L'usine de matériel électrique emploie 815 salariés en 1960, 900 en 1966, 1300 en 1972, 1100 en 1977, 825 en 1988, 675 en 1992, 400 en 1999. Aujourd´hui, 70 salariés travaillent sur ce site.
Chercheur au service régional de l'Inventaire de 1985 à 1992, en charge du recensement du patrimoine industriel.