Dossier d’œuvre architecture IA59005681 | Réalisé par
Ramette Jean-Marc (Rédacteur)
Ramette Jean-Marc

Chercheur de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France.

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Fournier Bertrand (Rédacteur)
Fournier Bertrand

Chercheur de l'Inventaire du patrimoine - Région Hauts-de-France

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Perrin Emeline (Contributeur)
Perrin Emeline

Chargée de projets et documentaliste à l'Ecomusée de l'Avesnois

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  • patrimoine industriel, Empreintes industrielles - patrimoine textile de l'Avesnois-Thiérache
Moulins à blé, puis filature de laine peignée Caudry-Goutierre, puis Coilot-Caudry, puis Pécqueriaux-Lebrun, puis usine génératrice d'énergie, actuellement immeuble à logements et auberge et gîte du Moulin
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
  • (c) Écomusée de l’Avesnois Fourmies-Trélon

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Communauté de communes Coeur de l'Avesnois - Avesnes-sur-Helpe
  • Commune Étrœungt
  • Adresse 17 rue du Moulin
  • Cadastre 1872 E1 154 à 161  ; 1872 B1 23 à 25, 38 à 41  ; 2023 OB 818  ; 2023 OE 2, 942, 1224 à 1226, 1312, 1313  ; 1813 A6 2154 habitations ; 1813 B1 3 Moulin
  • Dénominations
    moulin à blé, filature, usine génératrice d'énergie
  • Précision dénomination
    filature de laine
  • Appellations
    Caudry-Gouttière, Pécqueriaux-Lebrun, Gîte du Moulin, Coilot-Caudry
  • Destinations
    auberge, immeuble à logements
  • Parties constituantes non étudiées
    vanne, atelier de fabrication, logement d'ouvriers

Ces moulins hydrauliques, situés de part et d'autre de la rivière l'Helpe-mineure, ont probablement une origine ancienne. Destinés d'abord à la mouture de grains, ils sont transformés après 1830 en filature hydraulique de laine. L'activité qui se développe alors modifie considérablement la configuration du site.

Sous l'Ancien Régime, le site comprend deux moulins hydrauliques appartenant à Louis-Philippe, duc d'Orléans. Après le terrible ouragan qui dévaste la région le 12 juin 1774, les édifices industriels doivent faire l'objet d'une reconstruction (Lebeau & Michaux,1859). Les deux logements qui font face aux moulins, et qui devaient leur être associés, portent la date de 1779 par fers d'ancrage, ainsi qu'un blason aujourd'hui buché mais où figure encore le collier de l'ordre du Saint-Esprit, distinction que Louis-Philippe d'Orléans avait reçue en 1762. Ces logements pourraient constituer l'un des éléments de cette reconstruction d'ensemble. Au décès du duc en 1785, son fils, Louis-Philippe-Joseph hérite du titre de seigneur d'Avesnes, d'Eclaibes, d'Etrœungt et environs. Il est guillotiné en 1793. Tous ses biens sont alors mis en vente publique et rachetés par Pierre-Ferdinand Ozenne (Lebeau & Michaux, 1859).

Les deux moulins à blé sont rachetés en 1799 par Louis Mahy, propriétaire au Nouvion. En 1822, suite au décès de son mari, la veuve Mahy met en location "deux moulins à farine, l'un à deux tournants, l'autre à un tournant, communiquant l'un à l'autre par une vantellerie servant de pont, avec une belle maison de maître, à l'usage du meunier, écuries, étables, toits à porcs [...]" (Petites affiches de Valenciennes, 8 juin 1822).

À partir de 1834, le "Petit moulin" est racheté par Jacques Caudry, filateur à Féron, qui, l'année suivante, fait l'acquisition du "Grand moulin", qui lui, reste à usage de mouture de blé (Moulins en Avesnois, Etroeungt centre [en ligne]). Le 17 novembre 1834, Jacques Caudry sollicite l'autorisation "d'établir une filature de laine peignée de la force de 8 à 10 CV sur l'Helpe-mineure, dans la prairie du sieur Bryez située à Etroeungt et [qu'il] vient d'acquérir". Le 1er février 1837, une ordonnance du roi autorise Monsieur Caudry-Gouttiere à "établir une filature de laine peignée sur le barrage du moulin qu'il possède et à creuser le lit de la rivière d'Helpe, pour se procurer la force motrice nécessaire à l'action de ce nouvel établissement. La vantellerie du moulin restera composée, comme par le passé, de 4 vannes présentant ensemble un débouché de 5,68 m. La hauteur de ces vannes, au-dessus du radier, est fixée à 1,37 m" (AD Nord : S 5354). À partir de 1845, la filature de laine apparaît dans les Statistiques industrielles sous le nom de Coilot-Caudry (AD Nord, BM 745).

Les moulins, dont l'un est à usage de filature et l'autre de mouture de blé, sont mis en vente en 1847 (d'après Le Journal de l'Observateur, 31 janvier 1847, cité dans Moulins en Avesnois) Ils sont achetés par Philippe Pécqueriaux, filateur, à la fin de l'année 1848.

En 1852, l'industriel demande au sous-préfet d'Avesnes à adjoindre un atelier de dégraissage de la laine à sa filature. Il précise que l'établissement est situé sur l'Helpe-mineure dont le cours d'eau est "assez considérable pour faire mouvoir simultanément le moulin composé de trois paires de meules, la filature avec ses 2200 broches et les accessoires". Cet atelier de dégraissage ne devrait traiter qu'environ 100 kg par jour (AD Nord, 2 Z 268). Les travaux d'extension semblent se poursuivre dans les années suivantes avec le prolongement vers l'est du Grand moulin, sur la rive droite, qui porte encore les trois premiers chiffres de la date de 185[-] et confirme la réalisation entre 1850 et 1859.

En 1866, "dans le cadre de la vente sur licitation, par suite de la liquidation de société, d'une filature de laine peignée. Il est décrit comme un bâtiment nouvellement construit, en pierres et briques, couvert en ardoise, […] composé d'un rez-de-chaussée comprenant une vaste salle où se trouvent les machines de préparation, dix-huit métiers de 260 broches, système mule-jenny, le tout mu par une machine horizontale à condensation de la force de 35 CV. 2) De magasins, forges et menuiserie. 3) D'un gazomètre alimenté par deux cornues. Un autre bâtiment servant de cantine. Le tout est édifié sur un hectare, 12 ares et 56 centiares de terrain. La mise à prix est de 100.000 F." (Courrier du Nord, 7 décembre 1866). Les dimensions énoncées correspondent à celles des installations figurant rive gauche, au cadastre de 1872, qui sont inscrites au rôle d'imposition comme filature de laine appartenant à Jules Pécqueriaux. Rive gauche, l'édifice portant la date par fers d'ancrages y est désigné comme magasin de laines (AD Nord, P 35/476).

La filature poursuit ses activités sous la houlette de Jules Pécqueriaux, au moins jusqu'en 1885 (Liste des peignages, filatures et tissages, 1885). L'établissement disparaît des listes en 1896 (Liste des peignages, filatures et tissages, 1896), confirmant la cessation de cette activité textile dans l'intervalle. L'étude attentive du cadastre et de la carte postale datant du début du XXe siècle révèle l'importance des transformations réalisées après cette période. Le Grand moulin de la rive droite a disparu à une date inconnue ainsi que la partie ouest de l'extension datant du milieu du XIXe siècle. Celle-ci abritait le passage couvert desservant la rive gauche de l'Helpe-mineure. Par ailleurs, l'édifice a été rabaissé d'un niveau. En 1898, le Petit moulin est transformé en usine de production d'électricité. Il restera en fonction jusqu’en 1946 sous la raison sociale SA de l'Usine électrique Etrœungt (AD Nord, 2 Z 268).

Les vannes de la vantellerie sont remplacées à une date inconnue. Elles proviennent des Établissements Gabriel Viry à Remiremont (88), entreprise fondée en 1963.

En 1976, la municipalité rachète le site et transforme le magasin de laine situé sur la rive droite en gîte rural. Sur la rive gauche, les vestiges de la filature sont quant à eux convertis en appartements. Les deux roues horizontales qui se trouvaient dans la coulerie ont été démontées. De même, les baies ont été modifiées et la toiture abaissée. L'atelier de fabrication, qui le prolongeait au sud, a certes gardé ses trois niveaux d'élévation, mais il ne compte plus désormais que cinq travées contre treize initialement. Enfin, plusieurs baies ont été condamnées et/ou modifiées lors de sa transformation en logements. Toutefois, le mécanisme d'entrainement (arbre et rouets métalliques) a été en partie conservé.

Force motrice, équipement industriel et production

En 1845, la filature de laine fonctionne avec 10 métiers et 11 "machines" totalisant 1812 broches actionnées par une machine à vapeur (AD Nord, BM 745). En 1852, la filature qui est désormais exploitée par Pécqueriaux, dispose de 2200 broches et ainsi qu'un atelier de dégraissage nouvellement construit, traitant environ 100 kg par jour (AD Nord, 2 Z 268).

En 1859, la filature Pécqueriaux-Lebrun est toujours équipée de deux roues hydrauliques, dite supérieure et inférieure, qui font fonctionner les broches (L'Écho de la frontière, 12 mars 1859). Mais après l'extension du Grand moulin, la force hydraulique semble devenue insuffisante et les industriels demandent en 1863 l'installation d'un gazomètre avec une cloche à gaz de 4 m de diamètre et 3 m de haut, ainsi qu'un fourneau équipé de deux cornues selon le système Bodard ; l'ensemble devant alimenter une machine à vapeur d'une puissance de 30 CV installée l'année suivante pour faire mouvoir des métiers à filer la laine (AD Nord, 2 Z 268).

En 1866, l'établissement comporte des "machines de préparation, dix-huit métiers de 260 broches chacun, système mule-jenny, le tout mu par une machine horizontale à condensation de la force de 35 CV. [...] ainsi qu'un gazomètre alimenté par deux cornues" (Courrier du Nord, 7 décembre 1866). En 1885, la filature Péqueriaux est équipée de 5000 broches self-acting (Liste des filatures et peignages, 1885).

Évolution des effectifs

En 1845, la filature de laine Coilot-Caudry emploie 43 personnes : 20 hommes, 12 femmes et 11 enfants (AD Nord, BM 745 : Statistiques par établissements industriels). 

 

  • Période(s)
    • Principale : 4e quart 18e siècle , daté par source
    • Principale : 2e quart 19e siècle , daté par source
    • Principale : 3e quart 19e siècle , porte la date
  • Dates
    • 1779, daté par source
    • 1837, daté par source

Des deux moulins initiaux, érigés en vis-à-vis, de part et d'autre de l'Helpe-mineure, ne subsiste que le Petit moulin situé rive gauche de la rivière. Construit en pierre sèche et brique en reprise en maçonnerie, l'édifice mesure 10 m de long sur 6,5 m de large. Il est attenant à l'atelier de fabrication, de 16 m de long sur 11 m de large, qui s'étend au sud et abrite aujourd'hui les appartements. Le Petit moulin a conservé une partie de son mécanisme d'entrainement (arbres et rouets métalliques) mais a perdu ses deux roues hydrauliques horizontales. Les arbres de transmission qui alimentaient les machines de l'atelier de fabrication ont été sciés mais en partie conservés. La communication entre les deux édifices a été condamnée.Carte postale au tout début du XXe siècle montrant le Petit moulin transformé en usine électrique (AD Nord).Carte postale au tout début du XXe siècle montrant le Petit moulin transformé en usine électrique (AD Nord).

La filature aujourd'hui transformé en logements, comporte aujourd'hui cinq travées sur trois niveaux d'élévation. Ses murs sont également en pierre sèche avec brique et pierre de taille en chaînes d'angle. Les baies de l'élévation du côté est sont droites, à linteaux et appuis de pierre. Quatre d'entre elles ont été comblées. Celles du rez-de-chaussée ont été remaniées lors de la transformation du bâtiment en appartements. Le pignon nord, dont l'élévation est en partie masquée par le volume du Petit moulin, présente également des baies qui ont été condamnées, à l'exception d'une ouverture verticale, qui pourrait correspondre à l'emplacement d'un monte-charge. L'édifice est couvert d’un toit en ciment amiante, à longs pans à croupes.

Le magasin à laines, sur la rive droite, dans le prolongement du Grand moulin aujourd'hui disparu, mesure près de 24 m de long sur 13 m de large. Erigé en pierre sèche et brique en pignon et en encadrement de baies en plein cintre, il compte huit travées sur deux niveaux. Il est couvert d’un toit en ardoise à longs pans et demi-croupes. Le chronogramme sur l’élévation antérieure, rue du Moulin, est amputé de ses unités. Il forme le nombre 185[*]. Sa transformation en gite rural a dénaturé l'intérieur de l'édifice et condamné l’accès au sous-sol.

La vantellerie comporte 5 vannes aujourd'hui scellées en position haute. Une route, s'appuyant sur ses piles est aménagée afin de desservir la rive gauche.

Enfin, de l'autre côté de la rue s'étendent les logements de meuniers. Ils sont construits en pierre de taille grise et présentent une élévation de sept travées à rez-de-chaussée surélevé, à un étage carré et combles, complété de deux autres travées à droite. L'édifice, qui porte la date de 1779 par fers d'ancrages, présente aujourd'hui deux entrées, dont l'une a manifestement été aménagée à partir d'une fenêtre. L'entrée originelle était située au niveau de la troisième travée. Elle se distingue d'ailleurs des autres ouvertures en arc segmentaire par un encadrement de pierre moulurée surmonté d'un tableau buché (aux armes de la famille d'Orléans ?) et de la date sculptée en bas-relief de 1779. Une corniche denticulée de brique couronne l'élévation sur rue. L'ensemble est couvert d'un toit en ardoise à longs pans et pignons couverts. L'extension de droite, plus fortement remaniée dans ses ouvertures du rez-de-chaussée, conserve néanmoins deux grandes baies en plein cintre surmontées d'un oculus ovale logé au-dessus des écoinçons des ouvertures précédentes.

  • Murs
    • pierre pierre de taille
    • brique
  • Toits
    ardoise, ciment amiante en couverture
  • Étages
    2 étages carrés
  • Couvrements
    • charpente en bois apparente
  • Élévations extérieures
    élévation à travées
  • Couvertures
    • toit à longs pans demi-croupe
    • croupe
    • pignon couvert
  • Énergies
    • énergie hydraulique produite sur place
    • énergie électrique produite sur place
  • État de conservation
    établissement industriel désaffecté
  • Statut de la propriété
    propriété de la commune

Le présent dossier d'étude a été réalisé en 2024 par le Service de l'Inventaire du patrimoine culturel de la Région Hauts-de-France, en partenariat avec l'Écomusée de l'Avesnois, dans le cadre du projet Empreintes industrielles.

Il a bénéficié de l'aide précieuse et du travail de recherche de monsieur Jean-Yves Tordeux que le service de l'Inventaire remercie chaleureusement.

  • Plan annexé à l'ordonnance du roi, du 1er février 1837, autorisant M Caudry-Goutière à établir une filature de laine peignée sur le cours de l'Helpe mineur (AD Nord ; S 5354).

    AD Nord : S 5354

Documents d'archives

  • AD Nord. Bibliothèque administrative ; BA 745. Statistiques industrielles de la France. Statistique par établissements industriel : Département du Nord, 1845.

    AD Nord : BA 745
  • AP Écomusée de l’Avesnois Trélon-Fourmies. [non coté]. Listes des peignages, filatures et tissages de la région de Fourmies avec indication approximative du matériel de chaque établissement, 1885, 1896, 1902, 1907, 1909.

Bibliographie

  • LEBEAU, Isidore, MICHEAUX, Ainé. Notice historique sur la terre seigneuriale et sur les seigneurs Etrœungt. Avesnes : Éditions Michaux Ainé, 1859.

Périodiques

  • Moulins et pâtures à louer à Étrœungt. Petites affiches de Valenciennes, 8 juin 1822.

  • Accident à la filature Pecquériaux. L'écho de la frontière, 12 mars 1859.

  • Vente sur licitation d'une filature de laines peignées à Etrœungt. Le courrier du Nord, 7 décembre 1866.

Documents figurés

  • Position des moulins, de part et d'autre de l'Helpe-mineure, feuilles A6 et E1 du cadastre de 1813 (AD Nord ; P 31/696).

  • Plan de la filature Pécqueriaux-Lebrun et de ses environs établi lors de l'établissement d'un gazomètre, 1863 (AD Nord ; 2 Z 268).

    AD Nord : 2 Z 268
  • Position des moulins, de part et d'autre de l'Helpe mineure, feuilles E1, E2 et B1 du cadastre de 1872 (AD Nord ; P31/696).

  • Etroeungt (Nord). L'usine électrique sur l'Helpe mineure, carte postale, [vers 1900] (AD Nord , 5 Fi Etrœungt).

  • Etrœungt. Usine électrique, carte postale, vers 1900 (AP Écomusée de l’Avesnois Fourmies ; non coté).

    AP Écomusée de l’Avesnois Fourmies
  • Plan masse des Etablissements Pecqueriaux, montage d'après le tableau indicatif (AD Nord P 35/476) sur un extrait du plan cadastral de 1872, sections B1 et E1 (AD Nord ; Série P : 31/696).

Date(s) d'enquête : 2024; Date(s) de rédaction : 2024
(c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
Ramette Jean-Marc
Ramette Jean-Marc

Chercheur de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France.

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Fournier Bertrand
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