Dossier d’œuvre architecture IA59005706 | Réalisé par
Girard Karine (Rédacteur)
Girard Karine

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France.

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  • inventaire topographique, Le Quesnoy centre
Château comtal, puis château Marguerite de Bourgogne, puis caserne
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Hauts-de-France - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Communauté de communes du Pays de Mormal
  • Commune Le Quesnoy
  • Adresse Place Cernay
  • Cadastre 2024 000 E 02 0807  ; 1897 E 484 et 484 bis 484 : caserne et cour 484 bis : caves et grenier ; 1817 E 362 à 365 362, 363, 364 : jardin 365 : bâtiment dit du Grand et du Petit Gouvernement
  • Dénominations
    caserne, château, château fort
  • Appellations
    Caserne Cernay, caserne du Gouvernement, caserne 73, Château Marguerite de Bourgogne
  • Destinations
    immeuble de bureaux

Le premier château et son enceinte sont bâtis en 1150 par Beaudoin IV (1108-1171), comte de Hainaut. Le castrum, qui bénéficie d’une basse-cour et d’une enceinte indépendante mais pas d'un donjon, est bâti au sud de l’agglomération. C'est un vaste polygone d'une vingtaine de côtés, aux angles flanqués de petits contreforts plats et entouré de fossés. Le logis principal se trouve au sud. À son extrémité côté est prenait place une chapelle à deux niveaux et chevet plat. De la période romane (peut-être) subsistent deux étages de caves renforcées au XVIIe siècle. Une grosse tour en grès était située à l'entrée du château (Lebeau et Michaux, Recueil des notices de l'arrondissement d'Avesnes, 1859, cité par Gennevois, 1832). Augmentée d'un belvédère de forme octogonale en 1569, elle est détruite par un ouragan vers 1768 et ne sera pas relevée.

De sa construction jusqu'à la fin du XVe siècle, le château devient l'une des résidences principales des comtes de Hainaut. C'est d'ailleurs de ce qui lui a donné son nom de château Marguerite de Bourgogne (1374-1441). Cette fille du duc de Bourgogne Philippe II dit le Hardi, et de Marguerite de Flandre, devenue comtesse de Hainaut par son mariage à Cambrai en 1385 avec Guillaume, comte d'Ostrevent, vécut toute sa vie adulte au Quesnoy où elle mourut en 1441. Afin de satisfaire aux exigences de confort d'une demeure comtale, le château est donc régulièrement entretenu et agrandi : modernisation du logis par Jeanne de Constantinople (1206-1244) en 1236, puis par Philippe III de Bourgogne, dit Philippe le Bon (1396-1467) en 1445, ajout en 1460 d'un mur de refend dans les souterrains pour les vins de la comtesse Marie de Bourgogne (1477-1482) (Liardet, 2014).

À partir de 1533, afin de satisfaire à la demande de Charles Quint (1500-1558), les fortifications sont adaptées aux nouvelles armes d’artillerie. En conséquence, l’enceinte médiévale est intégrée dans les nouveaux aménagements et le château, désormais séparé de son parc, est englobé avec sa basse-cour dans l’enceinte urbaine. Il fait partie du système défensif de la ville et sert d’habitation au gouverneur militaire de la cité. C'est ainsi qu'il apparait sur le plan dressé par Deventer en 1545 (ill.) : des bâtiments jointifs, dont la chapelle, sont regroupés autour d'une cour circulaire et séparés de la ville par un fossé en eau interrompu au nord par les fortifications urbaines.

Il faut attendre le XVIIe siècle et l'intervention de Libéral Bruant (1631-1697), architecte ordinaire du roi, pour que le château soit de nouveau modifié : une nouvelle aile est construite côté est entre 1681 et 1684, ainsi qu'une cuisine. Les travaux sont confiés à Armand François, entrepreneur au Quesnoy et mayeur de la ville, pour la somme de 3600 livres (Liardet, 2014). La nouvelle aile d'un seul niveau est en brique et grès, couverte par une toiture à longs pans et croupes en ardoise. Elle est percée de 18 hautes fenêtres. Un niveau de caves peu enterrées relie la nouvelle aile à l'ancienne. Durant la seconde moitié du XVIIIe siècle, le pavillon Cernay (partie ouest de la caserne) est reconstruit sur les caves médiévales.

Sur le plan de la ville dressé en 1769 (BNF-Gallica), le château apparait avec les numéros 73 pour l'actuelle caserne Cernay (appelée caserne du Gouvernement), 85 pour la tour de l'écritoire, 84 pour la prison détruite (détruites toutes les deux en détruite en 1807) et 87 pour la salle des gardes (appelée salle d'armes) située au-dessus de la porte d'accès au château (ill.).

Au cours de la période révolutionnaire les dépendances brûlent, mais les habitants parviennent à sauver le château de l'incendie (Liardet, 2014). La toiture est refaite en 1798. Le bâtiment est donné à la ville par l'Armée en 1811, puis racheté à la ville par l'Armée en 1820 pour la somme de 10 000 francs. Les bâtiments sont transformés en caserne pour accueillir 140 hommes. Le Mémoire sur la place du Quesnoy, établi en 1846 (AD Nord, 66J1725) décrit comme suit la caserne 73 (numéro porté par la caserne sur les plans des ingénieurs militaires à partir du début du XVIIIe siècle) : "Cette caserne est composée de plusieurs corps de bâtiments désignés par les lettres A, B, C et D. On ignore l'époque de la construction. Le bâtiment A est le seul qui maintenant sert de logement pour la troupe, il contient 121 lits. Le pavillon B a été affecté en 1838 au chef du génie. Le bâtiment C servait à loger le petit état-major et ne sert aujourd'hui que pour l'enseignement mutuel. Il est question d'en faire un logement pour le commandant de place. Le bâtiment D renferme une forge et la cuisine du bâtiment A."

Après 1872, un mess est installé dans le pavillon et le bâtiment Cernay (aile édifiée par Libéral Bruant) abrite une infirmerie, et des magasins pour le Génie. Ces fonctions durent jusqu'à la fin de la Première Guerre mondiale, mais n'ont pas de répercussions sur l'architecture des bâtiments. Ce n'est pas le cas de l'arrivée en 1928 de la garde républicaine mobile (organe militaire créé en 1926) qui occasionne d'importants travaux : les dépendances sont démolies et remplacées par une dalle béton pour unifier l'entresol des deux parties du bâtiment, et pouvoir y installer des bureaux ; de même toutes les fenêtres sont recoupées (Liardet, 2014). À partir de cette date, l'immeuble ne cessera plus d'accueillir des bureaux.

Il redevient propriété de la commune en 1968. Cette dernière travaille actuellement (2024) avec un promoteur privé (Histoire & patrimoine) afin de le transformer en appartements. Le projet prévoit de conserver les caves pour les ouvrir à la visite, et de recréer un parc autour du château.

  • Période(s)
    • Principale : milieu 12e siècle , daté par travaux historiques
    • Principale : 2e quart 16e siècle , daté par travaux historiques
    • Principale : 4e quart 17e siècle , daté par travaux historiques
    • Principale : 2e moitié 18e siècle , daté par travaux historiques
    • Principale : 1er quart 19e siècle , daté par travaux historiques
    • Principale : 2e quart 20e siècle , daté par travaux historiques
  • Auteur(s)

L'immeuble est précédé d'un petit parc. La juxtaposition de bâtiments d'époque différente en rend le plan un peu complexe. Il associe deux bâtiments (ou ailes) rectangulaires de taille presque équivalente, décalés l'un par rapport à l'autre et réunis à leur extrémité, formant une sorte de plan en Z. Côté ouest, orienté est/ouest, se trouve le bâtiment Cernay (ancien château de Marguerite de Bourgogne), côté est se trouve le Pavillon (construction par Bruant) orienté nord-est/sud-ouest. La jonction entre les deux immeubles se fait à l'emplacement de l'ancienne chapelle dont une grande arcade gothique est encore visible sur le mur du pavillon, qui à cet emplacement forme comme un avant-corps.

Côté façades sur le parc, les deux bâtiments présentent la même élévation d'un rez-de-chaussée surélevé, un étage carré et un étage de comble. Mais un seul niveau (rez-de-chaussée surélevé) est visible à l’arrière du Pavillon, la grande toiture prenant la place du second niveau présent sur la façade avant. Dans les deux cas, l'accès se fait par un degré à volée droite et limons situé à l'extrémité du bâtiment : à gauche pour Cernay et à droite pour le Pavillon. Tous deux sont couverts par une toiture à longs pans et pignon couvert du côté de la jonction, mais avec une croupe sur l'autre extrémité bâtiment. La toiture de Cernay s'achève par un léger coyau et celle du Pavillon est percée de lucarnes capucines. Les tuiles mécaniques sont utilisées pour toute la toiture sauf le pan à l'avant de la toiture du Pavillon, couvert en ardoise.

Les matériaux des deux ailes présentent des différences. Si le soubassement en grès est très visible sur Cernay (en particulier sur la façade principale où il occupe presque un demi-niveau), le crépi tyrolien recouvrant le reste du mur masque le matériau d'élévation. Pour le Pavillon, la disparition partielle de l'enduit sur l'arrière du bâtiment permet de voir le mur de briques posées en appareil picard, les chainages d'angle harpés en calcaire, ainsi que le soubassement en grès. Sur la façade principale du Pavillon, un décor de faux pans de bois, datant sans doute des modifications apportées vers 1930, est toujours visible en-dessous de la toiture.

L’aile Cernay compte neuf travées sur la façade arrière et sept sur celle avant. La porte bâtarde à deux vantaux et imposte vitrée est située dans la travée de gauche et ouvre sur un vestibule octogonal hérité des travaux de Libéral Bruant. Insérée dans un pan de mur décoré de faux bossages plats avec refends, c’est la seule baie en plein cintre du bâtiment. Toutes les autres fenêtres sont couvertes par un linteau. Les baies des pignons sont sans doute de percement récent. Elles s'intercalent entre les conduits de cheminée sur la façade ouest mais sont situées symétriquement par rapport au centre de la façade sur le pignon ouest.

La façade arrière du Pavillon (partie construite à la fin du XVIIe siècle par Bruant) compte sept travées, chacune s'achevant par une lucarne. Comme sur la façade principale, toutes les baies sont couvertes par un arc segmentaire. Le mur pignon est percé d'une porte centrale précédée d'un degré à volée droite en pierre bleue. La façade principale du Pavillon est plus complexe. La partie côté est forme un léger avant-corps en retour d'équerre et présente donc un mur pignon. Ce mur porte une arcade en plein cintre, seul vestige de la chapelle gothique du château initial. L'arcade bouchée est seulement percée d'une porte. La partie centrale, légèrement en retrait, offre deux niveaux de façade et trois travées. L'extrémité ouest de la façade forme un avant-corps dont la couverture s'inscrit dans le prolongement de la toiture principale. Il ne compte qu'une seule fenêtre (au premier niveau) et une porte de service au sous-sol. Des fers d'ancrage lancéolés décorés d'une feuille sont visibles sur toutes les façades du pavillon.

D’autres traces de l’emprise au sol de l’ancien château subsistent aujourd’hui. Ainsi, en face du château, le rang de maisons construites au XIXe siècle le long de l’avenue des Néo-zélandais (ill.) occupe l’emplacement des anciennes écuries comtales. Sur le cadastre de 1817, c'est encore un bâtiment d'un seul tenant appartenant à un huissier (parcelle 368), mais sur celui de 1897, le rang est loti en petites maisons avec jardins appartenant au même propriétaire-rentier. La présence des moellons de grès en soubassement, moins fréquents au XIXe siècle et surtout réservés à des maisons plus bourgeoises, laisse à penser qu'une partie du bâti des écuries a été repris et adapté à de nouvelles fonctions lors de la construction des maisonnettes.

  • Toits
    tuile mécanique, ardoise
  • Étages
    rez-de-chaussée surélevé, 1 étage carré, étage de comble
  • Couvertures
    • toit à longs pans croupe
  • Escaliers
    • escalier de distribution extérieur : escalier droit en maçonnerie
  • Statut de la propriété
    propriété d'une société privée, Protégé au titre des Monuments Historiques : inscription par arrêté du 2 février 2016
  • Protections
    inscrit partiellement
  • Précisions sur la protection

    Sont protégés depuis 2016 les vestiges de l'ancien château comtal en totalité, comprenant la caserne Cernay (ancienne grande salle du château et pavillon du XVIIIe siècle avec leurs caves médiévales), la tour-porte d'entrée corps de garde, les vestiges des deux tours, les sols des cours, les fossés et les vestiges qu'ils renferment, selon le plan annexé à l'arrêté (cad. E 793, 805 à 807, 1763 ; une partie de la place du Jeu de Balle, de la place du Général Leclerc, de l'avenue des Néo-Zélandais).

    Notice Mérimée : PA59000197

Documents d'archives

  • AD Nord. Série J, Documents entrés par voie extraordinaire depuis 1944 ; Sous-série 66, Archives de la direction régionale du Génie de Lille ; 66J1720 à 66J1725. Mémoire sur la place du Quesnoy, rédigé en exécution de l'article 42 de l'instruction du 22 mars 1842 sur la rédaction des projets dans les places, 1846.

    AD Nord : 66J1725
  • DRAC Nord-Pas de Calais. Le Quesnoy (Nord) - vestiges de l'ancien château comtal (caserne Cernay, tour-porte d'entré/corps de garde, vestiges archéologiques) : dossier de recensement. Dossier établi par Olivier LIARDET, recenseur Monuments historiques. Lille, 2014.

Bibliographie

  • GENNEVOISE, M.J., Monographie de la ville de Le Quesnoy. Bulletin de la société d'études de la province de Cambrai (Histoire de Flandre, Tournaisis, Cambrésis, Hainaut, Artois), tome XXXII, 1932.

    Membre perpétuel de la société d'études.

  • GILOTEAUX, Paulin (abbé). Histoire de la ville de Le Quesnoy : des origines à nos jours. Réédition. Paris/Autremencourt : Office d'éd. du livre d'histoire, 1997. (collection Monographies des villes et villages de France ; 1643).

    Première édition : Le Quesnoy : chez l'auteur, Œuvres charitables, 1960. 175 p.-24 pl.

Périodiques

  • DE MEULEMEESTER, Joseph. La fortification en terre et son influence sur le développement urbain de quelques villes des Pays-bas méridionaux. Revue du Nord, tome 74, n°296, 1992.

Documents figurés

  • Quesnoy, par Deventer, 1545. In Plan des cités des Pays-Bas, partie II, 1545 (Bibliothèque nationale d'Espagne ; bdh0000043514).

    Réédition par Charles RUELENS, 1884, Bruxelles [sous le titre] Atlas des villes de la Belgique au XVIème siècle : cent plans du géographe Jacques Deventer exécutés sous les ordres de Charles Quint et Philippe II.

  • Plan du Quesnoy, dressé en 1682 (BNF-Gallica ; btv1b8445244k).

    BNF-Gallica : btv1b8445244k
  • Plan du Quesnoy - légende des ouvrages de la fortification du Quesnoy, [s. n.], 1787 (BNF-Gallica ; btv1b531002939).

    BNF-Gallica : btv1b531002939
  • Plan des bâtiments cour et jardins du ci-devant gouvernement de la ville du Quesnoy pour servir à indiquer les parties à occuper par l'administration du district de cette ville, château du Quesnoy, dressé par DELEBERT le 2 novembre 1791 (51Fi - Plans extraits des séries des AD Nord, arrondissement d'Avesnes 1668-1828 ; sous-dossier Le quesnoy : bâtiments du Gouvernement du Quesnoy et des parties à occuper par l'administration du district : plans ; 51Fi4).

    AD Nord : 51Fi4
  • Plan du Quesnoy, 3ème année républicaine, [1794] (AD Nord. Série J ; Documents entrés par voie extraordinaire depuis 1944 : Sous-série 66 : 66J1720 à 1874 : ville du Quesnoy).

    AD Nord : 66J1720
  • Fragment de plan relatif à la demande en permission de bâtir du Sr Dronby en date du 22 janvier 1839, [plan établi le] 16 février 1840, [par] Juhel, chef de bataillon du génie en chef (AD Nord. Série J, Documents entrés par voie extraordinaire depuis 1944 ; Sous-série 66, Archives de la direction régionale du Génie de Lille ; 66J1720 à 1874 : ville du Quesnoy ; 66J1865).

    AD Nord : 66J1865
  • Plan de la place du Quesnoy portant l'indication au moyen des signes conventionnels de l'état des manutentions des divers ouvrages de la place en juin 1880, plan levé par le chef du génie [signature illisible] (AD Nord. Série J, Documents entrés par voie extraordinaire depuis 1944 ; Sous-série 66 : ville du Quesnoy ; 66J1805).

    AD Nord : 66J1805
  • Le Quesnoy - Commune du Quesnoy - Aménagement et extensions de la ville - Etat actuel - Plan, par A. Guyomard, ingénieur-géomètre agréé à Lille, le 6 août 1921 (AD Nord ; Fi - Provenances diverses : plans concernant le département du Nord, 1581-1922 ; 50Fi2285).

    AD Nord : 50Fi2285
  • Vue aérienne du Quesnoy réalisée en 1934 (IGN. Photothèque nationale. 1934).

  • Le Quesnoy - L'infirmerie militaire et une partie du cercle de MM. les officiers, carte postale, B.F. éditeur, Paris [sans date] (AD Nord, 5Fi47).

    AD Nord : 5Fi47
  • 19 - Le Quesnoy - Dépendance du château de Marguerite de Bourgogne (construit au XIIe siècle par Beaudoin IV, comte de Hainaut), L. Couture, éditeur, Haumont, carte postale [s. d.] (AD Nord, 5Fi79).

    AD Nord : 5Fi79
  • Le Quesnoy - La caserne des Gardes Républicains, carte postale, Dufour - Aubry, éditeur, Le Quesnoy, [s. d.] (AD Nord, 5Fi80).

    AD Nord : 5Fi80
Date(s) d'enquête : 2023; Date(s) de rédaction : 2024
(c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
Girard Karine
Girard Karine

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France.

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