Dossier d’œuvre architecture IA60005385 | Réalisé par
Chamignon Lucile (Rédacteur)
Chamignon Lucile

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France (depuis 2020).

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Dinh Amaryl (Rédacteur)
Dinh Amaryl

Stagiaire au service de l'Inventaire général du patrimoine culturel, Région Hauts-de-France (septembre 2023).

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  • inventaire topographique, Communauté de communes Oise Picarde
Demeure dite "Le Chalet"
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Hauts-de-France - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Communauté de communes de l'Oise Picarde - Saint-Just-en-Chaussée
  • Commune Plainville
  • Adresse 1 rue du Chalet
  • Cadastre 2019 B 267

La maison que l’on surnomme "le chalet" et qui a donné son nom à la rue où elle se trouve, anciennement rue de la Ploye, révèle les ambitions sociales et religieuses de l’abbé Sterlin. Roselyne Bulan, de la Société académique de l’Oise, s’est penchée en 2015 sur le parcours atypique de ce personnage.

 

Le projet d’accueillir les orphelins de 1870 à Plainville

À son arrivée à Plainville en 1862, Louis-Irénée Sterlin entreprend immédiatement de reconstruire l’église du village, indispensable à la réalisation de ses projets. Ayant étudié au Séminaire des missions étrangères mais finalement affecté dans une paroisse de l’Oise, le curé entend propager ses idéaux religieux et sociaux dans les campagnes picardes. Il s’engage pour la patrie dans la guerre en 1870, l’église étant à peine achevée, et à son retour en triomphe à Plainville en 1871, il entreprend la construction d’un orphelinat et d’une école pour les orphelins de la guerre tout juste terminée. Il s’inspire de la "Maison rurale" du docteur Adolphe Jouanne à Ry (Seine-Maritime) : son établissement se veut un "spécimen miniature d’harmonie sociale", "modèle pour les entreprises industrielles et les travaux domestiques, en France et dans nos Colonies". L’éducation proposée est ainsi avant tout pratique, plutôt que religieuse.

 

La construction du chalet

Le chalet, destiné à accueillir la maison du Directeur, qui n’est autre que Sterlin lui-même, constitue la première étape. Comme pour l’église, l’aumônier fait appel aux dons des paroissiens de la région. L’architecte V. Chappe livre en 1873 cette imposante et luxueuse demeure bourgeoise, qui dispose dès sa construction de l’eau chaude et froide, d’une salle de billard, d’une bibliothèque, de cheminées en marbre, mais aussi d’un oratoire avec vitraux et grisailles. Les cartes postales anciennes révèlent que la toiture a été simplifiée. En effet, les extrémités des pans étaient surmontées aux angles, au niveau des acrotères, d’ornements géométriques qui peuvent rappeler les toitures des pagodes chinoises. Une ligne de faîtage à fleurs de lys, probablement en fer forgé, décorait également la toiture avec des croix en guise d’épi de faîtage.

Le terrain, acheté à Catherine-Anastasie Pigory, veuve Rançon, dispose d’écuries, d’un jardin fruitier, d’une citerne et d’une pompe. L’opulence de son habitation est l'un des motifs reprochés à l’abbé Sterlin que l’archevêque de Beauvais, Gignoux, mute en janvier 1874 dans une autre paroisse, d’autant plus que des économies auraient pu être réalisées si le curé avait logé dans le presbytère. Un acte de vente est tout de même signé en mars 1874 avec la même veuve Rançon, pour acheter un terrain comprenant l’ancienne cour d’honneur du château de Plainville et l’emplacement du château, lequel avait été vendu en 1833 à Rançon & Compagnie, membres de l’association de la Bande noire, responsables de sa destruction. L'espace, situé derrière l’église, elle-même implantée dans l’axe qui servait d’allée au château, était destiné à accueillir l’orphelinat. Cette action fait réagir l’archevêque de Beauvais qui contraint Sterlin, couvert de dettes, à retourner à la vie civile.

 

Le chalet, propriété privée

Suite à la destitution de l'abbé, ses biens à Plainville – le chalet, la maison d’Olivier Blangy attenante au chalet, les terrains derrière l’église -, sont saisis et le chalet est attribué à la suite d’enchères à Olivier Blangy et sa femme Rosalie Talma. Après des péripéties en Belgique et en Suisse, Louis-Irénée Sterlin retourne à Plainville avec sa deuxième femme et les deux enfants issus de son premier mariage avec Élise Houpin qu’il avait rencontrée lorsqu’elle était encore religieuse au couvent de Domfront (Oise). Il loue à Olivier Blangy le chalet, où il vit d’après le recensement de 1881 avec sa famille et un professeur particulier pour ses enfants, Céline Dubois. Il célèbre le culte catholique réformé dans la chapelle de l’oratoire du chalet, mais les autorisations sont rapidement révoquées. Devenu anticlérical, Sterlin fait de nombreuses conférences sur ce sujet à Plainville avant de quitter le village en 1884.

 

Le dernier souffle du projet d’orphelinat

En 1895, il y revient avec un nouveau projet d’orphelinat, cette fois ci colonial, soutenu par l’Union phalanstérienne, mouvement fouriériste issu de la scission de l’École sociétaire. L’institution aurait eu pour but d’accueillir des orphelins entre 8 et 18 ans, de leur inculquer des valeurs morales et de leur apprendre un métier, avant de les envoyer en Algérie pour qu’ils soient redirigés dans les colonies françaises. Sterlin précise que les orphelins peuvent se marier librement mais seulement avec une orpheline, ce qui déplaît aux mouvements féministes de l’époque. Il est arrêté la même année pour escroquerie, ayant récolté des dons sans l’accord écrit de l’Union phalanstérienne, pour accueillir des jeunes filles désœuvrées de 16 à 18 ans et les envoyer dans les colonies en quête d’un avenir meilleur.

Le chalet est désormais propriété privée. Il n’a pas été possible de visiter l’intérieur de l’édifice. D’après la documentation, des bandeaux de carreaux émaillés à motifs géométriques bleus et blancs agrémentaient les fenêtres des ailes latérales. Chaque aile comportait deux cheminées en brique de chaque côté du pignon.

La demeure se situe rue du Chalet, ancienne rue de la Ploye qui tenait probablement son nom de sa forme autrefois coudée. Sur le mur en brique, un cartouche trapézoïdal, en pierre, sculpté en bas-relief et orné de rinceaux géométriques, indique l’architecte : V. Chappe et la date de construction : 1873. Les piliers du portail, au nombre de quatre, en brique, sont surmontés de chapiteaux en pierre. L’entrée se fait par le nord du terrain.

La maison en briques enduites par endroit de plâtre, avec des éléments de charpente en bois apparents et une couverture en ardoise, affiche un plan en croix grecque, surplombé en son centre par une flèche avec un essentage d’ardoise. Elle s'élève sur trois niveaux : un rez-de-chaussée, un étage et un comble aménagé dont les baies semi-circulaires sont percées aux extrémités de chaque aile de l'édifice. Une annexe comprenant un seul niveau est niché dans l'angle nord-ouest de la demeure.

Les toitures à longs pans et égouts retroussés débordent sur les pignons des ailes latérales du bâtiment ainsi que les murs. Elles sont soutenues par des aisseliers ouvragés en bois. La partie ouest de la façade a perdu ses aisseliers. Le bâtiment construit dans l'angle nord-ouest du bâtiment a sa toiture en appentis.

La partie basse de la flèche est de forme carrée, essentée d’ardoise. Chaque face comporte une lucarne. Elle est surmontée d’une flèche à égout retroussé avec une croix à son sommet.

La façade du bâtiment comporte une porte cochère en plein cintre, en retrait de laquelle se trouve à l’étage l’oratoire, percé d’une baie tripartite avec des arcs en plein cintre et des pilastres ronds en plâtre ou en pierre.

  • Murs
    • brique enduit
    • pierre
    • essentage d'ardoise
  • Toits
    ardoise
  • Plans
    plan en croix grecque
  • Étages
    rez-de-chaussée, 1 étage carré, étage de comble
  • Couvertures
    • toit à longs pans pignon couvert
    • flèche carrée
    • appentis
  • Techniques
    • céramique
  • Précision représentations

    Des carreaux de céramique à motifs géométriques animent la façade de la demeure.

    Les pilastres de l'oratoire sont ornés de chapiteaux à motifs végétaux.

  • Statut de la propriété
    propriété d'une personne privée

Documents d'archives

  • AD Oise. Série O ; sous-série 2 O : 2 O 11588. Plainville. Presbytère (1840-1921).

  • AD Oise. Série O ; sous-série 2 O : 2 O 11596. Plainville. Dommages de guerre 1914-1918. Remise en état des bâtiments et biens communaux (1920-1932).

  • AD Oise. Série M ; sous-série 6 M : 6 Mp 563. Plainville. Recensements de population (1820 à 1936).

Périodiques

  • BULAN Roselyne. L’abbé Sterlin (1832-1912) : un curé picard au parcours atypique. Mémoires de la Société académique d’archéologie, sciences et arts du département de l’Oise, 2015, Tome 37.

Documents figurés

  • Plainville (Oise). Édifice dit « Le Chalet », carte postale, éd. Cartoux-Vimeux, Breteuil, [avant 1916] (AD Oise ; 18 Fi 1090).

Date(s) d'enquête : 2023; Date(s) de rédaction : 2023
(c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
Chamignon Lucile
Chamignon Lucile

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France (depuis 2020).

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Dinh Amaryl
Dinh Amaryl

Stagiaire au service de l'Inventaire général du patrimoine culturel, Région Hauts-de-France (septembre 2023).

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