Le temps des sucreries de betteraves : L'ancienne sucrerie Bernot émane d'une première fusion opérée à la fin du 19e siècle entre plusieurs sucreries fondées respectivement en 1836 et 1842.
La plus ancienne sucrerie est implantée en 1836 sur la parcelle A 72 (ref. cadastrales de 1826) par Théry et Arrachart. L'ancien moulin qui existait auparavant est démonté pour laisser place à de nouveaux bâtiments qui accueillent cette activité sucrière. Le second établissement est fondé en 1842 par Bernot, Boullet et Gérault sur les parcelles voisines A 75 à A 79 (ref. cadastrales de 1826). Les matrices cadastrales de cette date indiquent en effet une "construction neuve" pour une fabrique de sucre sur les parcelles A 75 à 78, occupés par la ferme du Vert Galant. Par ailleurs, la parcelle A 79 qui n'était pas lotie jusqu'alors, apparait en 1859 comme étant occupée de bâtiments pour une autre fabrique de sucre exploitée par Pierre-Désiré Prévoste. Il est toutefois possible que ces bâtiments aient constitué une extension du précédent établissement, engagée par l'un des associés ou actionnaires de la société, et ne soient pas à considérer comme une troisième sucrerie indépendante. En 1865, Louis Bernot, qui apparait en 1854 parmi les industriels fondateurs de la distillerie de Sébastopol, devient propriétaire de l'ensemble. Pendant ce temps, Arrachart qui exploite toujours la sucrerie voisine, fait le choix de construire sa propre distillerie à proximité immédiate de sa fabrique de sucre. En 1869, cette usine est dirigée par la société Arrachart, Lafeuille et Cie.
Après avoir construit les râperies de Buchoire et 1875 et d'Hombleux en 1879, pour les relier à sa sucrerie du Vert Galant, Louis Bernot s'engage dans la modernisation de son usine. En 1880, il entreprend la construction de plusieurs bâtiments et rachète la sucrerie Arrachart en 1884. Lorsque Achille Bernot prend la succession de son père en 1892, il est alors à la tête d'une des plus importantes sucreries du département, qui, en 1900, prend la raison sociale "Bernot fils".
Au début du 20e siècle, l'établissement poursuit sa modernisation technique en adoptant le système de diffusion et en construisant un nouveau four à chaux en 1903. L'augmentation des tonnages de betteraves traités par la sucrerie l'oblige à se fournir dans un périmètre plus étendu. Désormais l'approvisionnement des betteraves est assuré les péniches qui empruntent le canal de la Somme. Le charbon et les pierres à chaux sont également déchargés sur les quais au pied de la sucrerie avant d'être acheminés dans l'usine par une desserte ferroviaire spécifique.
De la reprise de l'activité sucrière après guerre au développement de la biochimie : Durant la Première Guerre mondiale, l'usine, située près du canal, est endommagée mais n'est pas détruite entièrement. Achille Bernot décide de ne pas intégrer la C.N.S.R. qui se constitue dans la commune voisine d'Eppeville, et privilégie la reconstruction de son usine qui reprend son activité dès la campagne betteravière de 1920. Bernot devient, avec d'autres industriels et cultivateurs de la région, l'un des acteurs de la Société Industrielle et Agricole de la Somme (S.I.A.S). Cette société rassemble plusieurs fermes et distilleries d'alcool de betteraves. Elle fonctionne également avec la râperie d'Hombleux.
A la réparation et la modernisation de la sucrerie engagée après la guerre, la S.I.A.S fait construire juste en face une série de logements pour le personnel. Les premiers sont des logements semi-provisoires, en brique, connus sous le nom de cité du Vert-Galant. Ils ont existé jusqu'en 1978, date à laquelle ils ont été démolis pour laisser place à d'autres logements construits par l'Office public d'H.L.M. de la Somme (OPSOM). L'autre cité, plus tardive, appelée cité SIAS, date plutôt de 1927-1928. Trois maisons de cette cité ont été reconstruites après la Seconde Guerre mondiale.
En 1958, la sucrerie passe sous l'égide de la Société Sucrière de Ham (S.S.H.). Elle devient une râperie pour le compte de la sucrerie d'Eppeville. Mais dès l'année suivante, l'activité sucrière est arrêtée définitivement. Les bâtiments sont repris en 1962 par la Société Industrielle et Commerciale d'Applications Chimiques (S.I.C.A.C.), fondée en 1957, qui transforme la biomasse de betteraves en détergents et éléments de produits pharmaceutiques. En 1965, l'usine est rachetée par la société de Recherche EXportation IMportation (REXIM) et confirme son orientation de production pour l'industrie pharmaceutique. Entre 1965 et 1971, de nouveaux ateliers et laboratoires sont construits. L'extension se poursuit avec la construction, en 1974, des entrepôts pour les produits finis, du bâtiment de séchage, en 1976, et de la station d'épuration en 1986. La majorité des constructions de l'ancienne sucrerie qui dataient du 19e siècle et du début 20e siècle est démantelé en 1980. Seul subsistent quelques maisons de la cité ouvrière de la fin du 19e siècle, et une partie du pavillon d'entrée qui a été augmenté d'un étage. Les logements ouvriers qui constituaient la cité du Vert Galant a également été détruit pour laisser place à un nouveau lotissement.
Depuis 2007, l'entreprise est devenue Evonik et fabrique des acides aminés pour l'industrie pharmaceutique.
Équipement industriel et machines : En 1883, les deux sucreries existantes produisent chacune entre 800 à 1000 t. de sucre par an. En 1892, la sucrerie fonctionne avec divers appareils à vapeur. Ces générateurs sont rapidement changés. L'établissement bénéficie en 1897 de deux générateurs Cail. En 1900, la sucrerie est équipée de 4 chaudières à vapeur. En 1958, la capacité de traitement est de 1500 t. de betteraves.
Approche sociale et évolution du personnel : En 1883, la sucrerie Bernot emploie une centaine de personnes par campagne, de même que la sucrerie Arrachart qui travaille avec un effectif équivalent. En 1934, la sucrerie emploie 265 ouvriers, dont 83 étrangers. En 1962, il n'y a plus qu'une vingtaine de personnes travaillant à la sucrerie et une cinquantaine à la SICAC. En 1975, à la faveur d'un changement de l'actionnariat principal, l'effectif passe à 240 personnes, puis à 275 en 1983. En 2010, l'effectif de la REXIM est supérieur à 400 salariés.