• inventaire préliminaire, arrière-pays maritime picard
Ferme du Trou-à-Mouches (Fort-Mahon-Plage)
Œuvre étudiée
Copyright
  • (c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
  • (c) SMACOPI

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Communauté de communes Ponthieu-Marquenterre - Rue
  • Commune Fort-Mahon-Plage
  • Lieu-dit le Trou-à-Mouches
  • Cadastre 1828 B 10-11  ; 1997 AL 2, 8, 247-249, 62, 67-68, 143, 7248
  • Dénominations
    ferme
  • Appellations
    Le Petit-Châteauneuf, Le Trou à Mouches
  • Parties constituantes non étudiées
    chapelle, étable, étable à chevaux, colombier, porcherie, puits, grange, porcherie, jardin, four à pain, pressoir à cidre, logement d'ouvriers, poulailler, four à pain, abreuvoir

Dufételle mentionne cette ferme dans sa monographie (1907) : il semblerait qu'elle ait porté le nom de "Petit-Châteauneuf" avant son nom actuel, le "Trou-à-Mouches" ; cette dernière dénomination s'expliquerait par la présence "d'un trou dont la terre a servi à réparer la digue voisine en 1737". Il indique encore que le Châteauneuf, dont est extrait le Trou-à-Mouches, était l'ancien fief Croüy-Boulainvilliers, qui est "don du roi au comte Henri de Boulainvilliers, en 1716, renclos par une digue, en 1737, tire son nom de M. de Châteauneuf qui en fut le premier locataire".

D'après Prarond, le marquis de Boulainvilliers, étant toujours propriétaire de ce domaine en 1738, obtint du roi, vers cette date, "la concession d'une renclôture du côté de l'Authie. On assura alors que ce ne fut que par la suite des travaux exécutés pour cette renclôture que le pays fut exposé aux inondations, inconnues jusqu'en ce temps".

En 1787, "M. Guerrier de Lormoy, ancien écuyer du Roi, capitaine du comte d'Artois" devint propriétaire d'au moins une partie du domaine de Château-Neuf, selon Rodière.

Vendu en plusieurs lots sous la Révolution, Dufételle explique que "le citoyen Lefèvre de la Houplière acquit la partie centrale qui continua de porter le nom de Châteauneuf, et qui plus tard fût divisée en trois fermes : celle de M. Charles de la Houplière que possède et habite à présent M. Elluin-Jacquet ; celle de M. Vincent de la Houplière qui est devenue la propriété de M. Destrée ; et enfin celle de M. Victor de la Houplière, dont le fermier actuel est M. Blin Paul, qui eut pour prédécesseurs MM. Devisme-Bouly et Tétu-Lens ».

Un document extrait du fonds privé de Delgorgue (A.D. 80 : 24 J 10) indique l´histoire de cette construction, appelée le Petit Châteauneuf, à la fin du 18e siècle. En effet, la ferme appartenait primitivement à un propriétaire nommé Clochepin et était située sur le territoire de Vron. Elle fut rachetée par Delgorgue et Cospin en 1797, tous deux résidant à Abbeville, et transportée à leur frais à son emplacement actuel. Elle fut donc reconstruite en partie à neuf (la grange au sud dont la charpente est en chêne et la bergerie et le hangar au nord) et en partie avec les matériaux de remploi, selon des proportions parfois différentes (les étables à l´est), entre 1797 et 1798. Le plan qui complète les écrits indique les fonctions de chaque bâtiment de la ferme primitive : à l´ouest se situe le logement du fermier, divisé du nord au sud par deux cabinets (chambres) dans la largeur de la construction, deux salles chacune pourvue d´une cheminée, encore deux cabinets, une écurie et enfin une partie à usage de magasin. Le côté sud de la cour est occupé par les granges : à l´ouest, la grange à blé, à l´est celle à avoine. A l´est de l´espace intérieur se situent les étables, du sud au nord : les étables à vaches, le poulailler et les étables à porcs. Le document parle également d´une forge et d´un moulin. La ferme fut ensuite louée à un fermier locataire, Lefèvre la Houplière : il s'agit donc d'une métairie.

Cette exploitation agricole figure sur le cadastre de 1828 (alors sur le territoire de Quend : la ferme appartient aujourd´hui au territoire de Fort-Mahon depuis sa création le 30 décembre 1922).

Dufételle ajoute (en 1907) que "c'était, il y a peu de temps encore, la plus grande exploitation agricole, mais des ventes partielles l'ont considérablement amoindrie". D'après la propriétaire, l´exploitation disposait d´une superficie de 100 hectares de terre sur Fort-Mahon. Il semble qu´elle ait été gérée par de nombreux exploitants successifs. L´auteur explique la vocation herbagère de la ferme par la chute démographique du lieu-dit : "Cette diminution eut pour cause la mise en herbages des fermes du Châteauneuf et du Trou-à-Mouches. Les ouvriers manquant de travail émigrèrent dans les centres industriels". A l´origine, le logis était moins étendu et laissait place, jouxtant les porcheries à l´ouest, à une cidrerie et à un four à pain (d´après un renseignement aimablement communiqué par la propriétaire). Il est possible aussi que l´extrémité orientale ait pu également être occupée par des bâtiments à vocation agricole : l´élévation est, comme celle des porcheries, un peu plus basse que le logis, et les portes cintrées semblent plutôt être celles d´étables. D'après une ancienne employée, un manège à moudre était situé dans la pâture, au niveau des étables à cochons.

Auparavant, la salle commune des ouvriers agricoles était recouverte d´un sol en terre battue. Une famille logeait dans cette habitation réservée aux employés, et deux autres familles dans celle flanquant l'entrée orientale. Certains étaient employés permanents, mais des saisonniers (des environs ou des Espagnols) étaient appelés pour la moisson et la saison des betteraves.

L'exploitation a fait l´objet d´une étude en 1945 dans le journal de voyage de l´architecte Bertier, auteur des monographies du chantier 1425 (ATP, Fonds Maget). L'auteur indique que l´exploitation était "désaffectée depuis l´occupation allemande : on y faisait auparavant un élevage intensif. Il ne reste plus qu´une centaine de bêtes dont s´occupe un ménager habitant à la porte de la ferme et un jeune garçon de ferme. Les bâtiments sont isolés de leurs voisins à chaque extrémité de la cour, c´est ainsi qu´on a pu sauver les trois quarts de la ferme lors de l´incendie récent d´une partie des étables et granges. Le logis est en torchis soigneusement traité et le reste des bâtiments en briques. L´ensemble des pâtures (ruinées à l´heure actuelle) côtoient la ferme". Le logis, aujourd´hui en brique, a donc été reconstruit au milieu du 20e siècle.

Un sceau (dont les initiales indiquent R N) avec fleur de lys a été découvert par le père de la propriétaire actuelle dans la mare de la ferme, peut-être celui d'un échevin ou mayeur du Marquenterre.

  • Période(s)
    • Principale : 18e siècle
    • Principale : 2e moitié 19e siècle
    • Principale : milieu 20e siècle

Cette ancienne ferme est implantée sur les foraines (butte de cailloux) de Quend, au lieu-dit "Foraine du Vieux Quend". L'entrée de l'ensemble agricole se fait par l'angle nord-est, marqué par deux piliers en brique avec chaperons. On observe d´ailleurs qu´il existe de tels piliers à l´angle symétriquement opposé, au nord-ouest, en partie détruits aujourd'hui.

Il s´agit d´une exploitation agricole (partiellement en activité) dont les bâtiments sont disposés autour d'une grande cour géométrique d'un hectare de superficie. La conception symétrique de l´ensemble est renforcée par le jeu bicolore apparent des briques : en effet, les briques rouges sont utilisées pour l´élévation des bâtiments sud et nord, tandis que les briques de couleur beige sont employées pour les bâtiments est et ouest. Aujourd´hui, le logis (au nord) est recouvert d´un crépi blanc qui atténue cette symétrie (originellement en briques jaunes).

Dans la cour, on peut encore voir l´emplacement d´une mare (aujourd'hui asséchée en raison du drainage des terres) et un colombier. Le bâtiment de section hexagonale est construit en briques (de couleur beige) avec toit en pavillon en ardoise. Une porte est aménagée dans une de ses faces à l'ouest et surmontée par une baie étroite. Sur deux autres pans, à la partie supérieure, des fenêtres semi-circulaires permettent l´entrée des pigeons.

Le logis, long de dix travées et orienté au sud, dispose d´un solin en moellons de craie. Les murs de refends font appel à un appareillage mixte de pierre de taille et de brique. Les pièces sont ainsi disposées, d'ouest en est : la salle d'eau, quatre chambres juxtaposées, la salle dite d'apparat, la salle commune et la cuisine (surélevée de trois marches), toutes ces pièces étant desservies au nord par un couloir. Toutes disposent d'un plafond relativement haut (trois mètres environ). Une cave semi-enterrée, située entre le logis des propriétaires et celui des ouvriers, est accessible depuis une ouverture pratiquée dans le mur gouttereau nord ; cette pièce voûtée, entièrement en pierre de taille, était également accessible depuis l'ancienne cuisine (porte aujourd'hui condamnée). Un soupirail permet d'introduire les denrées depuis la cour. Cette pièce possédait en fait le rôle de "saloir" : on y salait la viande et on la stockait. Au nord du logis se situe le jardin d'agrément dans lequel se situe un puits en silex.

Le logement des ouvriers de ferme prend place perpendiculairement, à l'arrière du côté oriental des porcheries, mais sa façade principale donne sur la cour. On entre directement dans la salle commune (aujourd'hui, la porte qui donnait dans la cour a été condamnée). Cette pièce comporte encore sa cheminée picarde avec son four à pain dont la voûte en briquettes, relativement basse, s'étend sur deux mètres de long. Le pressoir à cidre (d'une capacité de 100 kg de pommes par pressage) est encore en place. Le reste a été totalement modifié.

Le bâtiment bordant le côté ouest de la cour abrite les étables au centre avec granges aux deux extrémités : deux grandes portes charretières sont visibles au nord et au sud tandis qu´au milieu, on observe la présence de deux petites fenêtres semi-circulaires encadrant une porte cintrée. Le toit à longs pans et pignons découverts est en ardoise. Tous les autres toits sont recouverts de tuiles.

Les étables au sud sont percées en leur centre d´un élément médian, pourtant solidaire de la maçonnerie, formant une pièce indépendante des parties est et ouest. Cette chapelle, carrée, plus élevée que le reste et à pignon fortement saillant, est voûtée en berceau. Une seule porte, large baie à arc surbaissé (qui n´a pas son pendant), en permet l´entrée. Elle est surmontée d´un petit oculus dont on retrouve le symétrique sur la face sud. A l´intérieur, deux niches cintrées sont aménagées dans les murs est et ouest sur presque toute leur hauteur. Les côtés de ce bâtiment sont donc occupés par les étables dont les combles ont été utilisés pour engranger, si l´on en croit la présence des six lucarnes pendantes caractéristiques. Les boeufs sont parqués à l'est du bâtiment (cette partie est divisée en trois compartiments et les bêtes y sont séparées selon leur âge : un, deux ou trois ans). La vacherie (d'une contenance de 55 vaches laitières), dépourvue de cloison, occupe l'ouest de l'édifice. L´aération des étables se fait par de petites fenêtres semi-circulaires percées dans la face nord, côté cour. On remarquera que d´autres petites ouvertures rectangulaires et étroites, disposées à intervalles réguliers, scandent la face sud, aujourd'hui obturées. A l´extrémité ouest de ce bâtiment, prend place un poulailler, plus bas d´élévation et percé de deux portes étroites cintrées.

Le bâtiment oriental tient également lieu d´étable. A l´extrémité nord, prend place un logis, plus haut d´élévation (à étage).

Au bord de la pâture à l'ouest, une hutte est implantée.

  • Murs
    • brique
    • silex
    • pierre de taille
    • parpaing de béton
    • appareil mixte
    • moellon
  • Toits
    tuile, ardoise
  • Étages
    sous-sol, en rez-de-chaussée, 1 étage carré, comble à surcroît
  • Couvrements
    • voûte en berceau
    • charpente en bois apparente
  • Couvertures
    • toit à longs pans
    • toit en pavillon
    • toit à deux pans
    • pignon découvert
    • pignon couvert
    • noue
  • Statut de la propriété
    propriété privée
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler

Cet ensemble est difficile à dater. La couleur de la brique pourrait permettre d´avancer une datation avoisinant la seconde moitié du 19e siècle. Des fenêtres supplémentaires ont été percées au logis. Pour les étables et la grange à l'ouest, les portes charretières avaient leur pendant sur la face ouest, mais des remaniements ont été effectués pour laisser place à des portes plus étroites et moins hautes. Concernant la chapelle, aucun signe religieux ne vient s´inscrire sur la façade extérieure ou sur les murs intérieurs. Il paraît donc probable que l´utilisation de cette pièce comme chapelle n´ait pas été la fonction originale. Les étables à l'est de la cour indiquent sur la face ouest (côté cour) dans la maçonnerie des remaniements importants (surtout au niveau des ouvertures) qui indiquent peut-être un changement de fonction. Le logis du gardien à l'entrée ne semble pas faire partie du même ensemble de construction que le reste de l'exploitation : on peut imaginer une construction postérieure (probablement du milieu du 20e siècle).

Documents d'archives

  • AD Somme. Série J ; 24 J. Fonds privé du sieur Delegorgue, ferme du Petit Châteauneuf [fin 18e siècle - début 19e siècle].

  • ATP. Fonds Maget. Journal de voyage par Bertier, 1945.

Bibliographie

  • DUFETELLE, A. Monographie de Quend. Le Marquenterre. Paris : Le Livre d´Histoire, 2003. Réimpression de l'édition originale publiée à Abbeville, 1907.

    p. 24, p. 67
  • PRAROND, Ernest. Le Marquenterre. Rue, Le Crotoy, Quend, etc. Les seize communes du canton de Rue. Abbeville, Imp. Lafosse et Cie, 1905.

    p. 17
  • RODIERE, Roger. Statistique féodale du baillage de Rue et de quelques villages voisins. Première partie. Communes du canton actuel de Rue. Bulletins de la Société d´Emulation d´Abbeville, 1938-1942, t. XVII.

    p. 311-429

Documents figurés

  • Fort-Mahon. Plan cadastral, 1828 (AD Somme ; 3 P 333).

Date(s) d'enquête : 2004; Date(s) de rédaction : 2004