L´inventaire du patrimoine industriel et commercial de l´agglomération de Saint-Quentin a débuté en janvier 2004, après la signature d´une convention tripartite entre la Direction régionale des Affaires culturelles de Picardie, la Communauté d´Agglomération et la Ville de Saint-Quentin. La rédaction des dernières notices s´est achevée au début de l´année 2007. Ce recensement porte sur les usines et équipements sociaux, mais aussi sur le patrimoine commercial en lien direct avec l´histoire industrielle, principalement les maisons de négoce du textile du 19e siècle et du début du siècle suivant. La Communauté d´Agglomération se compose de vingt communes, mais le patrimoine industriel et commercial se concentre sur celles de Saint-Quentin, Gauchy, et plus modestement sur celles de Neuville-Saint-Amand et Harly. Les autres composantes de l´agglomération sont pratiquement dépourvues de ce type de patrimoine, non qu´il n´y ait jamais eu d´activités industrielles sur leur territoire mais parce que, pour la plupart, elles ne furent pas reconstituées après le désastre de la Première Guerre mondiale. La stratégie militaire transforma la ville de Saint-Quentin en bastion retranché et arasa les villages environnants pour la constitution d´un véritable glacis militaire. Quant aux rares activités industrielles de l´après guerre, essentiellement la sucrerie, elles ont disparu au cours du siècle dernier.
Les recherches documentaires menées ont été multiples et diversifiées : dépouillements de matrices cadastrales, de registres des patentes, d´actes des tribunaux de paix et de commerce, d´annuaires et d´almanachs de la ville, de dossiers de constitution de dommages de guerre, de fonds bibliographiques anciens, etc. La masse documentaire disponible est considérable, bien que les deux conflits mondiaux et quelques malencontreux tris effectués dans les années 1960-1970 nous aient définitivement privés de toute une partie des fonds d´archives habituellement exploités dans le cadre des études sur le patrimoine industriel. Les archives d´entreprises qui auraient pu aider à l´opération d´inventaire sont pratiquement inexistantes, de part la fermeture ancienne de la plupart des usines étudiées, et la non conservation de leurs archives.
Si l´inventaire du patrimoine industriel et commercial s´attache essentiellement aux éléments subsistants de celui-ci, qu´ils soient encore en activité, reconvertis, à l´état de friche industrielle ou de vestiges archéologiques, quelques sites détruits suffisamment documentés ont été étudiés, bien que certains aient disparu depuis plus de 150 ans (comme la Filature Blanche, édifice emblématique de l´industrie cotonnière saint-quentinoise). Mais ces cas sont une minorité, au regard des quelques 1200 sites industriels, artisanaux et commerciaux répertoriés au cours des mois de recherches et de dépouillements dans les fonds d´archives, essentiellement municipales et départementales. Le choix a donc été fait de reporter la masse d´informations les concernant (activités, raisons sociales, dates de début et fin d´activité, nombres d´ouvriers, équipements principaux, etc.) dans une base documentaire réalisée grâce à un SIG ou Système d´Information Géographique, information qui n´est par conséquent pas disponible sur la base Mérimée, mais auprès du Service Architecture et Patrimoine de la ville de Saint-Quentin. Ce type d´outil est apparu indispensable pour la compréhension et l´analyse de l´histoire industrielle de ce territoire. L´exemple de l´étude des filatures de Saint-Quentin est explicite : entre 1804, date d´implantation de la première filature de coton dans la ville, et les années 1990, période de fermeture des derniers établissements de ce genre, cinquante-trois ateliers de filature ont été identifiés et ont pu être localisés géographiquement. Or seulement quatorze d´entre eux ont fait l´objet d´un dossier d´inventaire, soit en raison de la présence de vestiges architecturaux, soit, dans deux cas particuliers, pour leur importance dans l´histoire du développement de cette activité industrielle et malgré l´absence de vestiges bâtis.
Chercheur du service de l'Inventaire général du patrimoine culturel de Picardie, puis des Hauts-de-France, depuis 2002.