Dossier d’aire d’étude IA59005119 | Réalisé par
Dupuis Leslie (Rédacteur)
Dupuis Leslie

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France.

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  • enquête thématique régionale, Patrimoine de Villeneuve-d'Ascq, ville nouvelle
Le territoire communal de Villeneuve-d'Ascq - dossier de présentation
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  • (c) Région Hauts-de-France - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

  • Aires d'études
    Métropole européenne de Lille
  • Adresse
    • Commune : Villeneuve-d'Ascq

Ce dossier restitue l’étude consacrée au patrimoine de la ville nouvelle de Villeneuve-d'Ascq (construite de 1970 à 1983) dans le contexte plus vaste du territoire communal. Il présente donc l’évolution de ce territoire jusqu’à la fin du projet de ville nouvelle ainsi qu’une analyse de la morphologie urbaine à l'échelle de la commune.

Via le "corpus d'œuvres" ce dossier permet d'accéder à l'intégralité des dossiers de l'étude : secteurs de la ville nouvelle ou antérieurs à la ville nouvelle. Ces dossiers sont organisés à partir des quartiers définis en 1983, fin de la période sur laquelle a porté la recherche. Vingt de ces vingt-quatre quartiers ont été étudiés, laissant de côté ceux qui étaient prévus dans la ville nouvelle mais n’ont pas été construits. La Cité scientifique (IA59005411), secteur situé dans un quartier non étudié, est rattachée directement au présent dossier.

Par ailleurs un dossier est spécifiquement consacré à la ville nouvelle de Villeneuve-d'Ascq (IA59005333) : il comporte un historique et une analyse détaillée de la ville nouvelle. Il permet d’accéder exclusivement aux dossiers des secteurs urbains créés dans le cadre de la ville nouvelle.

Pour une présentation des conditions d'enquête, voir le dossier La ville nouvelle de Villeneuve-d'Ascq - conditions d'enquête (IA59005118).

Préambule : la ville nouvelle et Villeneuve-d'Ascq, un territoire commun

L'étude sur le patrimoine de la ville nouvelle vise à comprendre le développement de cette ville particulière et analyser ses formes. Il est donc nécessaire de bien connaître le territoire sur lequel elle s’est greffée. En effet la ville nouvelle (d'abord appelée Lille-Est) est bâtie dans les limites territoriales d’une seule commune, Villeneuve-d’Ascq, elle-même créée le 25 février 1970 par la fusion de trois communes rurales : Flers, Annappes et Ascq. Son territoire étant donc partiellement et anciennement occupé - et non un terrain vierge - la ville nouvelle a dû s’adapter à un "existant", absorber des éléments plus anciens. Cela fait partie de son identité.

Retracer l'évolution du territoire communal de Villeneuve d'Ascq permet en outre - de façon plus large - d'étudier quelques manifestations caractéristiques de l'urbanisation périphérique des Trente Glorieuses. En effet, en moins de trente ans ce territoire à dominante rurale, gagné sporadiquement par l’industrialisation, est touché par l’expansion urbaine spontanée engendrée par la métropole - sous forme de lotissements et de grands ensembles - avant de devoir accueillir une "cité scientifique", puis de devenir une des neuf villes nouvelles françaises.

Un territoire rural…

Ce territoire rural de 2 746 hectares est situé à seulement 6 km à l’est de Lille. Il est constitué d’une plaine humide, au contact entre le secteur sablonneux du Barœul au nord-est et le plateau crayeux du Mélantois au sud. Le val de Marque y forme une zone marécageuse. Les sols limoneux, fertiles, favorisent les activités agricoles. Le milieu ne présente pas d’obstacle physique majeur à l’urbanisation, mais l’installation en zones humides requiert un drainage des sols, tandis que la profondeur des fondations et les hauteurs des édifices sont limitées.

Carte géologique (vers 1950). En orange les sables du Barœul, en vert la craie du Mélantois, en bleu la zone humide.Carte géologique (vers 1950). En orange les sables du Barœul, en vert la craie du Mélantois, en bleu la zone humide.

Attestée au Néolithique, l’occupation humaine s’intensifie dans le secteur d’Annappes pendant l’Antiquité tardive. Siège d’un domaine rural carolingien nommé Asnapio, Annappes est rattaché au IXe siècle au comté de Flandres. Au XIIe siècle, les archives mentionnent pour la première fois les paroisses de Flers et d’Ascq. Dès l’époque moderne plusieurs fermes et manoirs apparaissent, dont la toponymie sera conservée par la ville nouvelle : Cousinerie, Tir à Loc, Triau des Barois (futur Triolo). Le territoire, à vocation agricole, se structure progressivement autour des trois seigneuries de Flers, Ascq et Annappes, cette dernière étant érigée en comté en 1605. Les trois villages sont implantés le long de la zone de contact entre le Mélantois et la plaine humide. Le canal du Courant de Maître David est creusé en 1629 et dans la seconde moitié du XVIIIe siècle les marais sont asséchés. Estimée à 2 200 habitants au milieu du XVe siècle, la population des trois villages atteint 2 900 habitants à la veille de la Révolution.

Carte du territoire des trois communes au XIXe siècle.Carte du territoire des trois communes au XIXe siècle.

Au XIXe siècle, le territoire présente deux entités paysagères et agraires (carte ci-dessus) : bocage et habitat dispersé autour de Flers au nord (Barœul), champs ouverts et habitat regroupé au sud autour d’Annappes et Ascq (Mélantois). Le bâti de Flers (IA59005318) se concentre sur quelques rues entourant l’église paroissiale Saint-Pierre et le château. La commune compte plusieurs hameaux, dont le Sart et le Recueil. Annappes (IA59005419) est au contraire un village-rue. Dans le secteur nord, de part et d’autre de l’église paroissiale Saint-Sébastien, de grandes parcelles accueillent la ferme de Quicampoix et plusieurs châteaux, dont celui des Brigode-Montalembert. Au sud, le village tend à se développer suivant un maillage de rues perpendiculaires. Enfin, à Ascq (IA59005418), l’habitat s’organise sur un vaste quadrilatère de voies, notamment l’actuelle rue Gaston-Baratte où vient s’adosser l’église paroissiale Saint-Pierre. Trois grands axes de communication, rayonnant depuis Lille, traversent le territoire : une première route au nord part vers la Belgique, la route Lille-Lannoy gagne l’est, la route de Lille à Tournai part au sud-est. Les trois villages sont quant à eux reliés par de simples chemins vicinaux.

Flers : place de la Liberté, église paroissiale Saint-Pierre.Flers : place de la Liberté, église paroissiale Saint-Pierre.

Annappes : le château de plaisance de la famille Potteau, construit au XVIIIe siècle, devenu centre communal d'action sociale.Annappes : le château de plaisance de la famille Potteau, construit au XVIIIe siècle, devenu centre communal d'action sociale.

À partir du milieu du XIXe siècle, le dynamisme industriel de Lille, Roubaix et Tourcoing touche progressivement les trois communes. La ligne de chemin de fer Lille-Tournai (1865) sépare Annappes et Ascq, désormais pourvu d’une gare auprès de laquelle se fixent des industries mécaniques et textiles. À Flers, le développement industriel concerne principalement le secteur du Breucq qui, au nord, bénéficie de la proximité immédiate de Roubaix-Tourcoing et de l’implantation d’infrastructures importantes telles que le chemin de fer Lille-Tourcoing, la canalisation de la Marque et le Grand Boulevard (avenue de Flandre). Des usines de chimie et de teinturerie s’installent le long du canal, des logements sont construits au sud pour les salariés. Dans l’entre-deux-guerres, la municipalité de Flers, dont la population augmente fortement, imagine pour le secteur de Babylone un projet d’urbanisme qui demeure sans suite. La Seconde Guerre mondiale a peu d’impact sur l’organisation du territoire, bien que fort meurtrière et traumatisante : à Ascq, dans la nuit du premier avril 1944, 86 hommes sont massacrés par des SS.

Au lendemain du conflit, la croissance des villages et hameaux se poursuit ponctuellement, de façon classique, par le lotissement de parcelles agricoles : elles sont divisées en plusieurs parcelles à bâtir, de nouvelles rues sont créées, formant des îlots urbains. C'est par exemple le cas de la rue Louise-Michel, à Flers, créée par lotissement privé au milieu des années 1960 et reliée aux rues Jeanne-d’Arc et Alexandre-Detroy. Le terrain est divisé en parcelles en lanière sur lesquelles sont bâties des maisons mitoyennes positionnées en front de rue. Les trois rues délimitent, en l’entourant, un îlot urbain dont le cœur est occupé par les jardins et arrière-cours des maisons.

La formation d'un îlot urbain : la rue Louise-Michel à Flers. La formation d'un îlot urbain : la rue Louise-Michel à Flers.

Au milieu des années 1950, Annappes et Ascq comptent environ 4 000 habitants, Flers presque 8 000. Des réserves foncières anticipent le percement d’un futur canal à grand gabarit, au sud du Breucq.

… confronté à l’expansion métropolitaine : grands ensembles et lotissement de standing

Après-guerre, le territoire des trois communes est bouleversé par l’expansion urbaine métropolitaine consécutive à l’essor démographique. De 1946 à 1954, en effet, la population urbaine du Nord-Pas-de-Calais croît de 15,3 % (contre 11,1 % en moyenne nationale). Les ménages sont plus nombreux et exigeants. Les logements sont en nombre insuffisant et souvent vétustes. L’État répond à cette urgence par une politique de logement de masse : il stimule l’industrialisation de la construction qu’il finance massivement et se dote d’outils d’urbanisme opérationnel (dont les ZUP ou "zones à urbaniser par priorité", créées en 1958). Dans la région lilloise, parallèlement à l’élaboration des premiers plans d’ensemble d’urbanisme, la croissance urbaine reprend vers 1955, portée par des maîtres d’ouvrages institutionnels (collectivités, organismes HLM, sociétés d’économie mixte…) et des promoteurs privés (voir les annexes). Les derniers espaces disponibles dans les centres urbains anciens sont occupés, par exemple le secteur des remparts à Lille. En seconde couronne, comme aux Hauts-Champs à Roubaix, sont érigés les premiers grands ensembles, secteurs urbains planifiés comportant des logements en habitat collectif (barres et tours) et éventuellement en habitat individuel, ainsi que des équipements. Dans les années 1960, par exemple à Saint-André et Wambrechies, sont réalisés des groupements de maisons individuelles, appelés couramment lotissements, générant un phénomène d’étalement urbain1.

Carte du territoire à la fusion des trois communes en 1970.Carte du territoire à la fusion des trois communes en 1970.

Dans ce contexte, les territoires de Flers, Annappes et Ascq constituent une réserve foncière attractive : les terrains y sont vastes et accessibles. Peu peuplées, les communes sont dispensées de plan d’aménagement, ce qui facilite la réalisation d’opérations d’urbanisme. À partir du milieu des années 1950, les trois communes accueillent ainsi trois grands ensembles, bâtis sur initiative municipale avec une participation du secteur privé. Le premier, Babylone (IA59005472), est construit de 1958 à 1964 à Flers (secteur du Sart) sur les plans des architectes Jean Vergnaud et Edward Maignan. Il comprend 407 logements en îlots de maisons mitoyennes et longues barres de collectifs, implantés sur une trame orthogonale. Le grand ensemble La Résidence (IA59005474) est construit de 1958 à 1967 à Annappes, au sud de la voie ferrée. Dessiné par Jean Vergnaud et Emmanuel Maes, il comporte près de 1 500 logements en immeubles (majoritairement des barres) ou petites bandes de maisons mitoyennes. Le grand ensemble La Poste (IA59005475), lui aussi signé de l’architecte Jean Vergnaud et construit à Annappes, est implanté de 1968 à 1972 au nord de la voie ferrée. Environ 800 logements y sont répartis dans des barres, tours et bandes de maisons analogues à celles de la Résidence. Les trois ensembles sont pourvus de commerces et équipements.

Grand ensemble Babylone, boulevard Albert Ier (Jean Vergnaud et Edward Maignan, 1964).Grand ensemble Babylone, boulevard Albert Ier (Jean Vergnaud et Edward Maignan, 1964).

Grand ensemble La Résidence, avenue Claude-Debussy (Jean Vergnaud et Emmanuel Maes, 1958-1967).Grand ensemble La Résidence, avenue Claude-Debussy (Jean Vergnaud et Emmanuel Maes, 1958-1967).

Grand ensemble La Poste, angle des rues Pascal et François-Villon (Jean Vergnaud, 1968-1972).Grand ensemble La Poste, angle des rues Pascal et François-Villon (Jean Vergnaud, 1968-1972).

La construction de ces ensembles urbains nouveaux modifie profondément l’équilibre démographique des communes concernées, en particulier Annappes dont la population passe de 5 373 habitants en 1962 à 11 615 habitants en 1968, soit une croissance de 46 % en 6 ans. Un nouveau tissu urbain se greffe au contact de l’ancien et l’on parle désormais du « Vieil Annappes » pour désigner le village historique. La composition et le dessin de ces nouveaux quartiers sont soignés ; cependant leur morphologie générale contraste fortement avec les quartiers anciens, surtout là où domine l’immeuble collectif en îlot ouvert. Dans ce type de tissu, l'immeuble d’habitat collectif occupe le centre de l’îlot ouvert, défini par quatre nouvelles voies de circulation. En périphérie du terrain sont disposés parkings et espaces verts. Le rapport à la rue est indirect, car l'immeuble de logements est bâti en retrait. Tranchant par leurs formes modernes et leurs matériaux, les barres et les tours introduisent également une rupture d’échelle dans le tissu urbain. Ces projets marquent l’introduction d’un nouveau type d’urbanisme et d’habitat, au cœur d’un espace dominé par la maison individuelle en front de rue et les îlots urbains traditionnels.

Un exemple d'îlot ouvert : grand ensemble Babylone (Babylone, Jean Vergnaud et Edward Maignan, 1964).Un exemple d'îlot ouvert : grand ensemble Babylone (Babylone, Jean Vergnaud et Edward Maignan, 1964).

Par ailleurs, à la fin des années 1960, Annappes et Ascq accueillent un vaste lotissement de standing : le Domaine de Brigode (IA59005415) vise à attirer une population de cadres supérieurs "au vert", sur l’ancien domaine du château de Brigode (détruit en 1969 en raison de son mauvais état). Cette opération immobilière privée prévoit la réalisation de 600 logements individuels bâtis sur de spacieuses parcelles ouvertes sur un golf. Six tranches sont projetées, dont les deux premières (Brigode 1 IA59005456 et Brigode 2 IA59005457) sont bâties de 1968 à 1970.

Une ville nouvelle créée pour "donner une ville à l’université"

Au début des années 1960, les projets d’implantation de trois grands équipements viennent bouleverser l’avenir des trois communes et plus largement de la métropole lilloise. En 1960 tout d’abord est décidée la délocalisation au sud d’Annappes de l’université scientifique de Lille, qui manque de place intra-muros. Porté par Guy Debeyre, recteur de l’académie de Lille et président du comité régional d’expansion économique, le projet – nommé Cité scientifique  (IA59005411)– est cependant plus vaste : anticipant les technopôles des années 1970, Guy Debeyre souhaite mettre au service du développement du Nord un vaste pôle d’enseignement et recherche, visant à attirer les industries de pointe. Dans un premier temps, les architectes Noël Lemaresquier et Jean Vergnaud se voient confier la conception d’un campus de 120 hectares. En octobre 1964, 6 500 étudiants font leur première rentrée à Annappes dans des conditions difficiles puisque la première tranche n'est achevée qu’en 1967. En outre, bien qu’un nœud autoroutier soit prévu à terme pour assurer la liaison avec Lille, le campus est tout d’abord isolé en pleine campagne, sans infrastructures d’accès adéquates. Malgré ces difficultés, le transfert à Flers de la faculté de lettres et droit est acté en 1964. Guy Debeyre décide enfin – en tant que président du comité régional des sports cette fois – de bâtir sur la même commune un ambitieux complexe sportif d’échelle métropolitaine de 110 hectares avec stade, vélodrome et plan d’eau. L’afflux prévu de 40 000 étudiants et la future desserte des trois équipements laissent dès lors présager un développement de l’urbanisation sur le territoire des trois communes, dont la population en 1968 atteint 26 178 habitants. Il apparaît urgent de donner un cadre urbain aux facultés et d’anticiper, tout en le structurant, un très probable développement vers l’est de la métropole : le "problème de l’est lillois" s’impose ainsi aux premières réflexions portant sur l’aménagement régional.

La Cité Scientifique vers 1970 (AD Nord ; fonds CETE : 10Fi3332).La Cité Scientifique vers 1970 (AD Nord ; fonds CETE : 10Fi3332).

Au même moment en effet, la crise économique – touchant précocement le Nord-Pas-de-Calais textile et minier – suscite l’émergence de problématiques de reconversion et d’aménagement du territoire. La conurbation lilloise constituant le principal pôle de dynamisme régional, il apparaît nécessaire de structurer et conforter son développement, afin d’assurer des retombées bénéfiques sur l’ensemble de la région. En 1965, à l’initiative du ministère de la Construction et des Travaux publics, un schéma d’aménagement régional est élaboré par l’architecte-urbaniste Gérard Deldique. Le développement métropolitain est projeté sur un axe principal partant du nord-est de la métropole (Roubaix-Tourcoing), gagnant le "centre directionnel" de Lille et partant vers le sud-ouest (bassin minier). Situé à l’écart de cet axe, l’est lillois est cependant pris en considération. Le schéma Deldique y localise l’une des sept "unités d’habitations" prévues : une "ville parallèle" de type universitaire, de 40 000 habitants, entre Mons-en-Barœul et Flers.

La toute nouvelle direction départementale de l’Équipement est également mobilisée sur le problème de l’est lillois, en la personne de son chargé de l’arrondissement de Lille, Jean-Claude Ralite2. En 1966, l’idée de créer une ville universitaire s’impose en même temps que celle d’utiliser un tout nouveau dispositif : la ville nouvelle (voir les annexes). La décision est prise en octobre par le ministre de l’Équipement Edgard Pisani, qui en informe le préfet de région en décembre3. La création d’une ville nouvelle à l’est de Lille est officiellement actée le 6 février 1967, en comité interministériel pour l’aménagement du territoire.

Dans sa genèse, la ville nouvelle se singularise donc par son caractère d’opportunité : elle est avant tout envisagée comme une solution au problème posé par la localisation des facultés. Edgard Pisani le reconnaît lui-même : "Je me demande si j’ai eu conscience tout à fait de créer une ville nouvelle. J’ai plus le sentiment d’avoir contribué au rééquilibrage et au rééquipement d’un ensemble urbain un peu ignoré. Ce n’est donc pas tout à fait dans la logique du concept de ville nouvelle4. " (voir les annexes).

L'aménagement de la ville nouvelle (1967-1983)

Pour un développement plus complet consacré à la ville nouvelle, voir le dossier la ville nouvelle de Villeneuve-d'Ascq (IA59005333).

En résumé, le développement de la ville nouvelle connaît quatre principales phases :

1/ La phase d’étude et de mise en place du cadre foncier, juridique et technique (1967-1970)

Pour créer la ville nouvelle l’État use de pouvoirs exorbitants du droit commun en matière foncière et d’aménagement5. Plusieurs Zones d’Aménagement Différé (ZAD) sont créées pour limiter la spéculation sur les terrains pressentis, tandis que le foncier est mis à disposition par expropriation, après publication de Déclarations d’Utilité Publique (DUP)6. Par ces mesures de mainmise foncière, prises en octobre 1967, élus et habitants du territoire sont pour la première fois informés officiellement de la création de la ville nouvelle. S’ensuit une "crise des expropriations", recours judiciaire d’élus et habitants, à l’issue de laquelle les expropriations sont considérablement limitées. De fait, la naissance de la ville nouvelle s’inscrit dans un climat polémique et conflictuel.

Le 11 avril 1969 est créé l’EPALE (Établissement Public d’Aménagement de Lille-Est) organisme public chargé de la conception de la ville et de son aménagement (achat et viabilisation des terrains, planification et conception, revente aux promoteurs). Siègent au conseil d’administration, à parité, l’État et la CUDL (Communauté urbaine de Lille). Le 25 février 1970 a lieu la fusion des trois communes d’Ascq, Annappes et Flers, qui s'allient pour mieux peser sur l'avenir de leur territoire. Désormais le destin de la ville nouvelle se confond avec celui de la jeune commune, qui va d'ailleurs rapidement lui donner son nom.

La phase d'étude a pour objectifs de clarifier le programme de la ville nouvelle et définir les grands principes urbains qui vont constituer le socle théorique du projet. L’étude aboutit à un schéma fonctionnel : le Schéma d’aménagement du secteur Est, approuvé le 24 avril 1970. La ville y est pensée comme "une fédération de quartiers" aux densités de population et aux fonctions variées, définis à partir des noyaux urbains antérieurs et du maillage des infrastructures.

2/ Les premiers chantiers (1970-1976)

L’essentiel de la ville nouvelle est érigée durant cette première phase. Les infrastructures sont mises en place (assainissement, réseaux). L'EPALE reprend en main et intègre au projet de ville nouvelle plusieurs secteurs urbains dont la construction est imminente voire entamée (couramment qualifiés de "coups partis"). La plupart des quartiers nouveaux sont mis en chantier et les premières zones d’activités sortent de terre. Ces quartiers sont programmés individuellement et progressivement. Ils sont subdivisés en secteurs et îlots, unités territoriales et opérationnelles de base, confiées à des promoteurs.

3/ La crise politique et la suspension du programme (1977-1978)

Suite aux élections, la nouvelle municipalité soumet au vote des Villeneuvois la poursuite du projet de ville nouvelle qui est finalement décidée en novembre 1977. La commune de Villeneuve-d’Ascq s’impose comme acteur décisionnaire majeur et siège désormais au conseil d’administration de l’ÉPALE. Une convention tripartite entre l’État, la CUDL et la commune définit une nouvelle gouvernance, de nouvelles méthodes de travail et le programme de la ville restant à construire.

4/ La réduction et la finition anticipée du programme (1978-1983)

Le contexte de crise économique et de stagnation de la démographie métropolitaine conduit les différents partenaires à diminuer les ambitions de la ville nouvelle. Révision de la convention, puis plan de finition se succèdent : la réalisation de la ville nouvelle ne sera que partielle, la ville nouvelle - telle qu'elle a été pensée initialement – reste inachevée. On renonce à la construction de plusieurs quartiers, tout en se fixant comme objectif d'assurer la cohérence entre ceux qui ont été construits. Finalement le conseil municipal vote l’achèvement de la ville nouvelle pour le 31 décembre 1983. L’ÉPALE est dissous au 1er janvier 1984 : Villeneuve-d’Ascq est ainsi la première des neuf villes nouvelles françaises à être achevée.

En 1984 : une fédération de quartiers

En 1984 Villeneuve d'Ascq se compose de vingt-quatre quartiers ; peu nombreux sont ceux dont le tissu urbain date d’une seule époque :

Quatre quartiers présentent un tissu à dominante ancienne :

    • Quartier Le Beucq (IA59005464) : constitué partir du hameau ancien du Breucq.
    • Quartier Le Sart (IA59005463) : constitué partir du hameau ancien du Sart.
    • Quartier Annappes (IA59005419) : constitué partir du bourg ancien d’Annappes et du Hameau Saint-Sauveur, projet récupéré par l'ÉPALE.
    • Quartier Ascq (IA59005418) : constitué à partir du bourg ancien d’Ascq et du secteur nouveau du Triangle d’Ascq.

Cinq quartiers dont le tissu urbain majoritaire est plus récent, constitués à partir des "coups partis" :

    • Quartier Babylone (IA59005412) : il comprend le grand ensemble Babylone et un secteur plus ancien relevant du Sart.
    • Quartier La Poste (IA59005414) : constitué autour du grand ensemble La Poste.
    • Quartier Résidence (IA59005413) : constitué autour du grand ensemble La Résidence.
    • Quartier Brigode (IA59005415) : constitué à partir du lotissement de Brigode, que l’EPALE reprend à son compte et complète.
    • Quartier Le Moulin d’Ascq (IA59005462) : constitué à partir d’une opération lancée par la commune d’Annappes et récupérée par l’EPALE.

Un quartier mixte, le Quartier Flers-Bourg (IA59005318),présente un secteur ancien auquel se greffe un secteur nouveau. Il est constitué à partir du bourg ancien de Flers, des secteurs nouveaux de Flers-Neuf, La Croisure, et du Parc d’Activité du Fort.

Les douze quartiers nouveaux :

    • Quartier Le Triolo (IA59005122)
    • Quartier La Cousinerie (IA59005234)
    • Quartier Le Château (IA59005195)
    • Quartier Le Pont-de-Bois (IA59005219)
    • Quartier L'Hôtel-de-ville (IA59005342)
    • Quartier Les Prés (IA59005416)
    • Quartier Le Parc urbain (IA59005466),en fait uniquement composé d’un espace de loisir.

Cinq de ces quartiers nouveaux n'ont pas été construits :

    • Quartier Le Héron
    • Quartier Le Marais
    • Quartier Hempempont
    • Quartier La Croix de Wallers
    • Quartier Le Camp français (hors périmètre communal)

Enfin quatre quartiers à dominante de zones d’activités :

    • Quartier Le Recueil (IA59005339)
    • Quartier et Zone d'Activités de Pointe (ZAP) Le Tir-à-Loques (IA59005316)

Deux de ces quatre quartiers sont demeurés à l’état de projet :

    • Quartier Le Hellu
    • Quartier La Haute Borne

1Il s’agit de lotissements concertés : ensembles accompagnés de servitudes déterminant l’aspect architectural des bâtiments, ou intégrant la construction par un même investisseur des bâtiments sur les lots selon un ordonnancement commun (Thésaurus de la désignation des œuvres architecturales et des espaces aménagés. Ministère de la Culture et de la Communication, en ligne : http://data.culture.fr/thesaurus/page/ark:/67717/T96).2En 1966, le ministère des Ponts-et-Chaussées et celui de la Reconstruction et du Logement fusionnent et donnent naissance au ministère de l’Équipement. Ce ministère s’occupe d’aménagement du territoire, en lien avec la DATAR (Délégation interministérielle à l’Aménagement du Territoire et à l’Attractivité régionale), créée en 1963.3La « paternité » de Lille-Est revient donc au ministre de l’Équipement, comme l'exprime Jean-Claude Ralite en 2001 : « Ça tombait à un moment où le district de la région parisienne avait lancé l’idée, déjà, son projet de villes nouvelles du Schéma directeur [...] Le ministre avait un peu envie de faire comme Paul Delouvrier. » (cité par Arlette HÉRAT et Michel RUTENBERG, L’Espace public en ville nouvelle…, p. 41) On notera que l’ORÉAM-Nord (ORganisme d’Étude d’Aménagement d’aire Métropolitaine, lié à la DATAR) intervient postérieurement à la décision de créer la ville nouvelle. Créé en mai 1966, il publie son schéma directeur d’aménagement urbain de la métropole en 1968.4Cité par Guy BAUDELLE, Villeneuve-d’Ascq, ville nouvelle…, p. 26.5Il utilise cependant des outils juridiques préexistants, utilisés également dans les ZUP.6La ZAD est un dispositif légal de 1962 qui permet la préemption par l’État des terrains à la vente au prix fixé l’année précédant la ZAD.

Le territoire communal de Villeneuve-d’Ascq est très étendu, avec 2 750 hectares. De forme oblongue, il présente deux excroissances : au nord dans le secteur du Breucq et à l’est de la Marque.

Analyse du niveau d’urbanisation : un secteur de marge urbaine

De façon générale, on observe d’ouest en est :

• l’inversion du rapport global entre pleins et vides au profit de ces derniers,

• l'augmentation de la part des espaces "naturels" ou agricoles,

• la diminution globale de l’urbanisation avec une moindre densité d’occupation du sol et de plus en plus de discontinuité dans l’occupation des espaces.

La partie ouest de la commune est nettement plus urbanisée que la partie est ; elle constitue l’extrémité est de la zone urbaine métropolitaine. On peut différencier trois secteurs délimités par le réseau des voies de communication :

• Dans le secteur central, entre l’avenue de Roubaix au nord et la voie ferrée au sud, la continuité urbaine avec Lille et Mons-en-Barœul est clairement établie, malgré une zone moins dense vouée aux activités tertiaires et industrielles, d’axe nord-sud, le long du boulevard de l'Ouest.

• Au nord de l’avenue de Roubaix, Le Breucq, niché dans l’inflexion sud-est de l'avenue de Flandre, est en solution de continuité au nord-ouest avec Wasquehal mais reste entouré de zones non urbanisées : espaces agricoles, industriels ou voués aux réseaux.

• Au sud de la voie ferrée l’urbanisation est restée lacunaire ; des espaces vacants demeurent entre le centre bourg de Lezennes, le centre commercial V2, le quartier L'Hôtel-de-Ville et la Cité Scientifique.

La partie est de la commune constitue un secteur de marge urbaine, qui marque la limite est de l’agglomération métropolitaine. Cette limite est sinueuse ; deux grandes digitations urbaines s’avancent dans la campagne, bordées au nord et au sud par des secteurs ruraux, et séparées au centre par la vallée de la Marque et ses lacs. Le tout forme comme des "doigts" de ville et de campagne qui s’intercalent. Le contact entre espace urbain et espace rural s’effectue de deux principales façons :

• Soit de façon très nette, par des routes qui marquent véritablement la limite entre d’un côté un groupement d’habitation ou une zone d’activités, de l'autre la campagne. Ainsi dans le secteur de la Cousinerie Est, ou autour de la Cité Scientifique et du Triolo.

• Soit de façon plus diffuse, les routes servant de lignes de croissance urbaine, voies de pénétration de l’urbanisation dans les secteurs agricoles ou "naturels". Ainsi au niveau du Recueil, de Brigode.

Analyse du plan général : un patchwork sans centre affirmé

Le plan de la commune de Villeneuve-d’Ascq est complexe, de type polycentrique. S’agissant d’une ville nouvelle, il est atypique, marqué par une grande hétérogénéité et une apparente absence de structure, qui justifient les termes de mosaïque ou de patchwork, souvent utilisés pour décrire la ville. Une comparaison avec les plans de Val-de-Reuil ou de Saint-Quentin-en-Yvelines - homogènes, réguliers et géométriques - est éclairante. En outre à Villeneuve-d’Ascq les secteurs relevant de la ville nouvelle apparaissent ponctuels, mêlés à de multiples autres secteurs aux tissus divers (grands ensemble, centres anciens…).

On ne distingue pas clairement de centre ville, c’est-à-dire de secteur marqué par la convergence des voies de communication les plus importantes, par une forte densité urbaine et par la présence de grands équipements (église, hôtel de ville…). Plusieurs centres apparaissent cependant : Flers-Bourg à l’ouest, et La Cousinerie au nord-est présentent un aspect dense et compact et une structure concentrique que soulignent les voies de communication. Le véritable centre ville quant à lui se repère à cette échelle essentiellement grâce à la mention cartographique de l’Hôtel-de-Ville ; il est isolé au sud-ouest, à la fois en marge de la limite communale et de la zone urbanisée. On notera que le centre géographique du territoire est occupé par le secteur de Brigode et des lacs, peu dense et faiblement urbanisé.

Analyse du maillage par les voies de communication : un réseau qui divise

Le maillage - élément de la forme urbaine constitué par le réseau des voies de communication - est complexe, composite et irrégulier. Il s’inscrit dans un schéma radioconcentrique d’échelle métropolitaine, dont le centre est Lille.

En premier lieu le réseau d’échelle supra-communale crée d’importantes coupures urbaines, qui bouleversent l’organisation du territoire communal. L’autoroute urbaine A22 (à vocation nationale et européenne) traverse le territoire en son milieu, formant un T avec l'avenue de Roubaix. Une seconde coupure, d’axe est-ouest, est formée par la voie ferrée, plus au sud. Une troisième voie importante, l’avenue de Flandre, traverse l’extrême nord du territoire communal, sans trop d’effet de coupure cependant : ses abords sont urbanisés.

Sur cette base vient se greffer la voirie primaire constituée de boulevards reliant entre eux les divers quartiers, tout en assurant les communications avec les communes voisines. Ce réseau primaire est composé de radiales et de liaisons tangentielles, de moins en moins nombreuses vers l’est.

Les tangentielles sont les suivantes, d’ouest en est : le boulevard de l’Ouest (qui marque la limite avec Mons-en-Barœul) qui se poursuit au nord par la rue Jean-Jaurès ; le boulevard du Breucq, qui double partiellement la N227, et permet localement de la traverser et de relier les quartiers riverains ; la rue du 8 Mai 1945 / des Enfants de Sarajevo / Marcel-Bouduriez (D506) ; enfin le territoire est bouclé sur tout son secteur sud-est par la rue de Chanzy / rue du Président Paul-Doumer / rue Colbert (D952), voie périphérique qui sort cependant du territoire communal dans sa partie nord-est.

Les radiales sont les suivantes, du nord au sud : l’avenue de Flandre (ancienne route Lille-Belgique) ; la rue Jules-Guesde / avenue Champollion / avenue de Canteleu (ancienne voie Lille-Lannoy) ; l’avenue du Pont-de-Bois ; la rue Roger-Salengro / rue des Fusillés (il s’agit de l’ancienne voie Lille-Tournai) ; le boulevard de Tournai.

Malgré le doublage de la N227 par le boulevard du Breucq, le maillage primaire est perturbé. Souterrains et ponts de franchissement n’empêchent pas les détours ou la présence d'impasses. L’effet de coupure se manifeste très nettement en deux endroits : au nord, le large et sinueux boulevard de Mons, datant de la ville nouvelle, ne dépasse pas la limite du boulevard du Breucq à l’est et n’est connecté à aucune voie similaire de l’autre côté de ce boulevard. Au sud, l’axe ancien et rectiligne rue de Fives / rue de Chambord / rue de Lille, qui reliait les trois villages de Flers, Annappes et Ascq, a été coupé par la N227 et a perdu de son utilité.

À l’exception notable de ses éléments les plus anciens, la voirie primaire est séparative : elle délimite des quartiers, mais ne les traverse pas ; ses abords directs sont peu urbanisés. Elle ne "porte" donc pas l’urbanisation mais la tient à distance et fragmente d’autant l’espace. Cette logique est à l’exact opposé de ce qu’on peut observer le long des nationales urbaines ou des rues principales de faubourgs qui sont des polarités et des lignes de croissance urbaine. C’est le cas ici le long de l’avenue de Flandre et de la rue Jules-Guesde.

La voirie secondaire, raccordée à la voirie primaire, dessert l’intérieur des quartiers. À cette échelle encore, on observe une perte de densité du réseau au fur et à mesure qu’on gagne l’est du territoire. Surtout, la voirie secondaire se termine systématiquement en impasses dans tout le secteur du lac du Héron, la rue Colbert effectuant sa grande boucle beaucoup plus à l’est, sur la commune de Forest-sur-Marque.

La voirie tertiaire ou de desserte est caractérisée par la sur-représentation d’un type de voirie courbe ou même circulaire, arborescente et en impasses. Ainsi dans les quartiers nouveaux du Triolo, de La Cousinerie, de Brigode, dans une moindre mesure des Prés, et dans le grand ensemble La Poste. Quelques secteurs font exception avec une voirie orthogonale sans impasses : les centres-bourgs anciens de Flers, Annappes et Ascq, le grand ensemble Babylone, mais également l’Hôtel-de-Ville et les Prés.

Analyse du tissu urbain : une mosaïque de secteurs hétérogènes

Le tissu urbain est "le cumul d’aménagements de l’espace et leur relations les uns avec les autres", soit la combinaison des contraintes du site, de la voirie, du parcellaire, des édifices, des vides et des pleins (voir Bernard Gauthier, Espace Urbain..., p. 196). Il peut s’analyser à différentes échelles.

À l’échelle du territoire communal le tissu urbain est hétérogène et discontinu : il présente des entités très diverses, juxtaposées plus qu’articulées, et séparées par d’importantes coupures physiques. Ces coupures coïncident avec le maillage routier mais également avec les lacs, la réserve prévue pour le canal du Nord ou les lignes à haute tension.

Les secteurs constitutif de ce tissu hétérogène ont des profils différents liés à leur fonction. On observe ainsi : des zones résidentielles d’habitat majoritairement individuel (Brigode) à collectif (La Résidence, Le Pont-de-Bois) ; des zones d‘activités (parcs d’entreprises et centre commercial V2) ; des zones de loisirs (parcs et chaîne des lacs, complexe sportif) ; enfin deux campus universitaires.

Ces secteurs présentent eux-mêmes des types de tissus différents :

• un tissu de type "traditionnel": il est formé d'îlots urbains présentant un habitat aligné sur rues sécantes. Il correspond à des secteurs anciens (vieil Annappes, Ascq, Flers, Le Breucq...) ou aux secteurs les plus récents de la ville nouvelle (post-modernes) : Les Prés, Flers-Neuf... Les densités y sont fortes à moyennes. La voirie de ces types de secteurs - maillage de rues sécantes - permet (en théorie) une bonne connectivité (possibilité de mise en relation) avec le reste de l'espace urbain.

• un tissu de type "moderne" : il est formé d'îlots ouverts où sont implantés des immeubles d'habitat collectif ou intermédiaire. Il correspond aux grands ensembles. Parmi eux on distingue les secteurs des années 1950-1960 (Babylone, La Poste, La Résidence), aux vastes plans orthonormés, et les secteurs de la ville nouvelle (au Pont-de-Bois, Hôtel-de-ville, au Triolo...), de tailles modestes et de formes irrégulières. Les densités y sont fortes à moyennes. La connectivité dépend de la qualité de la voirie desservant et entourant ces secteurs.

• un tissu de type "habitat groupé" : il est formé de groupement d'habitations avec jardins sur parcelles distinctes, desservis par des voies privées ou semi-privées. On utilise fréquemment les termes lotissement ou pavillonnaire pour décrire ce type de tissu, mais il peut concerner aussi bien de l'habitat individuel que de l'habitat intermédiaire, organisé en petits immeubles. Il concerne quelques secteurs précédant la ville nouvelle (Brigode 1 et 2) et la grande majorité des secteurs de la ville nouvelle. Les densités y sont moyennes (par exemple au Château) à faibles (cas de Brigode). La voirie de ces types de secteurs, privée et fréquemment en impasse, limite la connectivité avec le reste de l'espace urbain.

Conclusion

La description du territoire communal de Villeneuve-d’Ascq soulève tout d’abord un paradoxe. Alors qu’elle a été conçue en treize ans dans le cadre d’une ville nouvelle, Villeneuve-d’Ascq présente plutôt la morphologie générale d’une ville qui serait - au contraire - issue d’un processus de croissance discontinue spontanée. Elle offre, comme le décrit Philippe Panerai "une organisation générale du territoire, ménageant des coupures (végétales/agricoles) entre les parties anciennes et les extensions, et par là sanctionne l’éclatement de la ville dans l’urbain" (PANERAI, Philippe. Éléments d'Analyse Urbaine, p. 18).

En second lieu la description met en lumière des manifestations morphologiques typiques des zones d’étalement urbain : discontinuités, faible densité, juxtapositions. Peut-on alors qualifier le territoire communal de péri-urbain ? À cette échelle, et pour ce qui concerne la structure, oui. Ceci dit, en considérant cette fois non pas la ville dans l’ensemble mais ses secteurs, on voit apparaître des tissus très cohérents, organisés, et parfois très denses, que ne connaissent généralement pas les milieux péri-urbains.

Bibliographie

  • SERVICE RÉGIONAL DE L'ARCHÉOLOGIE. RÉGION HAUTS-DE-FRANCE. Bilans scientifiques Nord-Pas-de-Calais, 2011, 2013.

    2011, p. 118 ; 2013, p. 94 ; 2015, p. 85.
  • BAERT Thierry (dir.). Les Lieux du savoir. Le patrimoine universitaire de la métropole lilloise. Paris : éd. Le Passage, 2014.

  • BELOSTYK Richard. La ville nouvelle de Flers, 1925-1939. Genèse et développement de la ville nouvelle de Villeneuve-d’Ascq. Société historique de Villeneuve d’Ascq, 2020.

    pp. 108-133.
  • BRUYELLE Pierre. La communauté urbaine de Lille, métropole du Nord-Pas-de-Calais. Paris : La documentation française, 1991. (Collection Les études de la documentation française).

  • GAUTHIEZ, Bernard. Espace urbain, vocabulaire et morphologie. Paris : Monum ; Éditions du Patrimoine, 2003.

  • HILAIRE Yves-Marie. Histoire du Nord-Pas de Calais de 1900 à nos jours. Toulouse : Privat, 1982.

    pp. 372-373.
  • OBSERVATOIRE RÉGIONAL DE L’HABITAT ET DE L’AMÉNAGEMENT NORD-PAS-DE-CALAIS. Mémoire de l’habitat du Nord Pas de Calais, Urbanisme et architecture. Réd. Dominique MONS, Jacky DEBOUDT. [Lille] : ORHA Nord-Pas-de-Calais, 1991.

    p. 68.
  • LOTTIN Alain (dir.). Histoire de Villeneuve-d’Ascq. Lille : Presses universitaires de Lille, 1982.

Documents figurés

  • AD Nord. Fonds CETE ; 10Fi3332. Photographie : la cité scientifique vers 1970.

Annexes

  • L'expansion urbaine de la conurbation lilloise après la Seconde Guerre mondiale
  • Les villes nouvelles françaises de l'après-guerre
  • Lille-Est, un projet qui prend de court la politique d'aménagement métropolitain
Date(s) d'enquête : 2017; Date(s) de rédaction : 2017
(c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
Dupuis Leslie
Dupuis Leslie

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France.

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