L’existence d’un moulin à blé à cet emplacement remonte au moins au milieu du XVIIIe siècle. D’après Flandrin, il est mentionné en 1762 comme appartenant au meunier Claude Courtin (Flandrin, 1947). Au début du XIXe siècle, le moulin appartient à la famille Heuzé (AD Somme, 3 P 171/3), également propriétaire de la ferme seigneuriale (IA80011052) et du domaine de Caours. Cet ancien moulin est représenté par Delignières de Saint Armand à la fin du XVIIIe siècle ou au début du XIXe siècle (ill.), puis sur une aquarelle d'Oswald Macqueron peinte "d’après nature" en 1840 (ill.). Sur ces représentations, la roue à aubes est installée contre le mur-pignon du bâtiment en brique, avec des rampants à couteaux. Une fenêtre est percée dans le pignon, au-dessus de la roue hydraulique. Le déversoir et les vannes de décharge sont représentées à droite. Enfin, le dessin de 1840 fait également figurer deux autres bâtiments à l'arrière-plan, dont celui de droite pourrait correspondre à la maison du meunier.

Vers 1840, le moulin est racheté par le comte de Butler, qui acquiert également la ferme seigneuriale (IA80011052) et les différentes parcelles du domaine de Caours. En 1842, il fait détruire le moulin hydraulique et la maison de meunier pour créer la même année une minoterie plus moderne et productive, équipée de plansichters (machine à tamiser les farines) et de cylindres de broyage (AD Somme, 3 P 171/4). Les fers d'ancrage situés au sommet de la façade longitudinale du grand bâtiment de brique portent également la date de 1842.

Dans la première moitié du XXe siècle, la minoterie est la propriété de M. Poidevin qui abandonne l'activité de meunerie au profit de la fabrication de pains de glace, selon un procédé de réfrigération hérité des travaux de l'amiénois Charles Tellier. Les pains de glace ainsi obtenus à une époque où les réfrigérateurs n'existaient pas, étaient d'abord livrés aux commerçants à l’aide d’une charrette, puis d’un fourgon dans un second temps.

L'usine de réfrigérant reste en activité jusqu’en 1965. Le site est ensuite transformé en pisciculture. L’édifice est conservé mais il est désaffecté. Il est probable qu'au moment du passage du moulin traditionnel à la minoterie moderne, la force hydraulique de la roue soit devenue insuffisante et qu'on y ait installé plutôt une turbine.