La cité du Château, aussi appelée cité Tourtier ou du Château Tourtier, est l´une des deux premières cités jardins construites à Longueau par la Compagnie des Chemins de fer du Nord, entre 1920 et 1924.
Le croisement des différentes sources permet de dater l´ensemble réalisé dans le parc du château acquis par la Compagnie en 1920. A la construction des habitations en 1920 et 1921 succède celle de deux foyers, celui des mécaniciens et celui des agents de train, seul subsistant aujourd'hui.
En 1924, la cité compte 56 logements, deux foyers et des installations complémentaires (pièce d´eau, kiosque, places), qui en font « la plus riante du Réseau », selon E. Brunel. A. Goissaud en fait l'éloge dans La Construction Moderne de 1926 et en attribue la conception et le dessin à l'ingénieur Raoul Dautry. Plusieurs photographies en donnent une représentation vers 1924. Les arbres du parc du château y sont conservés, répondant aux ambitions salvatrices du projet.
Bien qu´il n'en soit pas fait mention dans les matrices cadastrales, plusieurs maisons sont vraisemblablement lourdement endommagées et reconstruites entre 1939 et 1946 (allée des Jardiniers et des Tilleuls). Certaines, aujourd'hui détruites et remplacées par deux immeubles, se substituaient à trois bâtiments, dits cité des Anglais, détruits vers 1943.
Malgré sa taille réduite et la proximité de la Grande Cité, qui expliquent l´absence d´équipements collectifs, la cité Tourtier est particulièrement exemplaire de l´esprit recherché par Raoul Dautry pour les cités jardins de la Compagnie des Chemins de fer du Nord, ici prolongée par la cité de l'Avre qui s'étendait sur les jardins potagers des cheminots aménagés dans les hortillonnages acquis par la Compagnie.
Le château, aujourd'hui détruit, constituait lui aussi un intéressant exemple de l´architecture résidentielle périurbaine de la fin du 18e siècle et du 19e siècle. Sa typologie et son implantation à proximité de la rivière sont caractéristiques des maisons de villégiatures construites à Amiens ou dans les communes voisines. La déviation et la forte surélévation de la nouvelle voie empruntant le pont de chemin de fer a fortement amputé l'emprise du parc du château, désormais encaissé, qui perdait sa perspective au sud et son attrait résidentiel.
Sans doute construite pour René Boistel de Belloy, qui fait l'acquisition du fief de la Cour de Longueau vers 1770 (Seydoux, 2003), cette demeure de villégiature présentait des ailes de plan semi-circulaire au nord (doc. 1). Les détails de modénature visibles sur les photographies anciennes présentent des parentés stylistiques avec les constructions des années 1830 (bandeau plat et clef plate). La datation des agrandissements (adjonction des tourelles d'angle au sud) est plus problématique. Réalisés pour Michel Cornet, il faudrait les situer vers 1830 et non vers 1870 comme le suggère Ph. Seydoux. Les matrices cadastrales mentionnent cependant un agrandissement réalisé peu avant 1875 (date d'imposition) mais celui-ci aurait alors été fait à l'initiative du nouveau propriétaire G. Tourtier.
Chercheur du service de l'Inventaire général du patrimoine culturel de Picardie, puis des Hauts-de-France, depuis 2002.