Dossier d’œuvre architecture IA59005345 | Réalisé par
Girard Karine (Enquêteur)
Girard Karine

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France.

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  • opération ponctuelle
  • patrimoine de la Reconstruction
Église paroissiale Saint-Martin
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Hauts-de-France - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Communauté d'agglomération de Cambrai - Cambrai
  • Commune Fontaine-Notre-Dame
  • Adresse rue de la Liberté
  • Cadastre 2023 AC 01 103
  • Dénominations
    église paroissiale
  • Vocables
    Saint-Martin

En dépit des contraintes imposées par la Charte des sinistrés pour pouvoir bénéficier des dommages de guerre et en particulier le respect de la taille du bâtiment d'origine, l'église est originale. Beaucoup plus que le plan, le choix des matériaux, et en particulier l'usage visible du béton, fait de Saint-Martin une église moderne, à la fois loin des tenants d'une reconstitution à l'identique, du régionalisme porté par des architectes comme Louis-Marie Cordonnier ou des styles "néo" (gothique, roman, byzantin...). On peut en cela la rapprocher de l'église de Rocquigny (Pas-de-Calais) (IA62005100) due à l'architecte Jean-Louis Sourdeau (1929) mais surtout des productions de l'architecte Charavel qui théorise ces clochers en panneaux de béton ajourés dans son ouvrage Le village moderne paru en 1925 et les met en pratique la même dans l'église de Jussy (Oise) (IA02003181). On trouve également des similarités avec le clocher de l'église Saint-Martin de Martigny-Courpierre (Oise) de l'architecte Albert-Paul Müller (1932) où des anges atlantes entourent une flèche ajourée en béton (IA02010896). Le choix de la forme et des matériaux du clocher de l'église de Fontaine-Notre-Dame, qui font aujourd'hui l'originalité de l'église, ne s'est cependant imposé que tardivement dans le projet de reconstruction et ne figure pas sur les premiers projets de l'architecte datés de novembre-décembre 1924.

La modernité vient également du travail de décoration confié à des artistes attachés aux mouvements de renouveau de l'art sacré. Dans ces cercles, la peinture à fresque connait un nouvel engouement. Elle correspond à l'attachement de ces artistes - en particulier de Valentine Reyre - au Moyen-Âge, quand cette technique était largement utilisée. C'est également une technique peu coûteuse qui permet de décorer les églises tout en respectant les fortes contraintes de budget imposées par le respect strict des montants alloués pour les dommages de guerre. D'autres églises de la Première Reconstruction portent ce type de décors (Flesquières, Martigny-Courpierre, Mœuvres, Noyelles-sur-Escaut...). L'usage de la mosaïque (décors des arcs à la base du clocher-porche) connait également un renouveau dans le décor des églises reconstruites (à Flesquières par exemple) ainsi que sur les bâtiments civils de style Art déco. Ce qui constitue l'originalité de l'église Saint-Martin est leur utilisation pour des décors extérieurs.

On peut enfin souligner la qualité de la mise en œuvre des matériaux sur les façades : peu coûteux, le calepinage recherché (appareil anglais, en épis, en boutisses debout) et les jeux de couleurs des briques qui vont du jaune à l'orange, associés avec le gris des enduits béton permettent d'animer des murs qui ne portent aucun autre décor.

L'église avant la Première Guerre mondiale

La première église du village est édifiée au XVe siècle, à l'emplacement d'un fortin. Au XVIIe siècle, l'architecture des chapelles est remise au goût du jour. En 1750 un incendie détruit une partie de l'église. Seules les parties abîmées sont restaurées (DELALIN, PIETRZAK et JARRELOT, ca 1990). La tour est reconstruite par l'architecte diocésain André de Baralle à la fin du XIXe siècle (BISMAN, 2017).

La campagne photographique réalisée en 1905 par Augustin Boutique, photographe douaisien, permet de connaître la physionomie de l'église à la veille de la Première Guerre. C'est un bâtiment de plan en croix latine précédé d'un clocher-porche de plan carré (ill.). La nef est bordée d'un seul bas-côté. Les trois vaisseaux s'achèvent par une abside saillante (ill.). L'église ne compte qu'un seul niveau (ill.). La forme des baies varie selon la période de construction : plein cintre pour la partie fin XVIIIe siècle du chœur, arcs brisés pour le transept gothique et le mur gouttereau sud de la nef, arcs segmentaires (appelé également arcs surbaissés) pour la partie de la nef du XVIIe siècle. L'église est construite en pierre pour la nef et le transept (qui sont les parties les plus anciennes de l'église). Le chœur est en briques posées en appareil picard (appareil présentant en alternance un rang de briques posées en boutisses et un rang en panneresses).

En mars 1917, les Allemands font sauter la flèche de l'église à la dynamite afin qu'elle ne serve pas de point de repère pour l'artillerie alliée. Le reste de l'église est détruit entre novembre et décembre 1917 pendant la Bataille de Cambrai.

L'église reconstruite

Dès 1919, la commune sollicite l'attribution de dommages de guerre pour reconstruire l'église. Sur la somme demandée de quatre millions de francs, seul 1,5 million est attribué par la commission cantonale pour la reconstruction de l'église et la reconstitution de son mobilier. En mai 1923, la commune adhère à la coopérative diocésaine pour la reconstruction des églises. C'est désormais cette dernière qui prend en charge le suivi administratif du dossier des dommages de guerre, qui établit les cahiers des charges, qui s'occupe de lancer les marchés, choisit l'architecte et les sculpteurs, donne des avis sur les projets et les modifications éventuelles à y apporter, suit la réalisation des travaux et les paiements. La commune reste cependant libre d'accepter les propositions de la coopérative diocésaine et c'est à elle qu'il revient de signer les marchés de gré à gré avec les artisans qui participeront à la reconstruction de l'église, lorsque les montants sont inférieurs à 500 000 francs. En juin 1925, le Comité de pré-conciliation de Lille accorde à la municipalité le somme de 1,286 million de francs pour la reconstruction de l'église proprement dite.

L'architecte choisi est Ernest Gaillard, auteur de nombreux édifices civils et religieux dans le Cambrésis. Son premier projet, présenté en décembre 1922, est rejeté par le Ministère de l'Instruction Publique et des Beaux Arts car il ne rentre pas dans l'enveloppe budgétaire fixée par le comité de pré-conciliation. Le rapport permet d'avoir quelques idées de ce projet mais il n'a pas été retrouvé de représentations graphiques : utilisation de rouges-barres (alternance de lits de pierres calcaires et de briques), clocher-porche agrandi par rapport à celui de l'ancienne église, et "appareillage fantaisiste". Le second projet, plus modeste, est présenté devant la commission en septembre 1924 et validé en juillet 1925 car il "répond aux conditions exigées par la loi", c'est à dire qu'il ne dépasse pas le montant alloué pour les dommages de guerre. La réduction apportée à la hauteur du clocher et la simplification de la décoration ainsi que la surélévation de la hauteur de la nef et des bas-côtés permettentun meilleur éclairage de la nef.

Les travaux de gros-œuvre sont adjugés à l'entreprise Sorlin de Cambrai en mai 1925. La première pierre est posée en 1926 et l'église est inaugurée en octobre 1928.

Les matériaux de construction

Les matériaux de construction apparaissent dans le bordereau des prix établi par l'architecte et signé par la commune en juillet 1925 (AD Nord ; 2 O 240-120).

Pour le gros-œuvre, le béton doit être armé avec une structure en "acier doux".

Les enduits intérieurs et extérieurs seront réalisés en "simili pierre Cimental Broutin" posé en deux couches pour imiter un appareillage de pierre puis teinté au Silexore (peinture minérale hydrofuge qui durcit en prenant l'aspect de la pierre sous l'action de l'air et des UV, ce qui la rend presque inusable).

Le pavage du vestibule sera en briques cuites au four et moellons de récupération. Pour la nef, le sol sera réalisé en carrelage céramique trois tons (vert blanc et noir), posé suivant les dessins de l'architecte, fabriqués par Douzies à Maubeuge. Les seuils de marche et le dallage du degré seront réalisés en pierre bleue de Soignies (calcaire dur de couleur gris-bleu extrait dans l'Avesnois et en Belgique). Les marches menant aux autels doivent être en marbre rouge.

La couverture sera réalisée en tuile plate de Beauvais, posée au clou.

Comparaison entre le projet et la réalisation

L'église proposée en 1924 par Gaillard présente quelques différences avec la réalisation finale. Ces dernières concernent tout d'abord le plan et plus particulièrement la partie occidentale de l'église. Sur le premier projet, daté de septembre 1924 (ill.), l'architecte avait prévu un vestibule ouvert uniquement sur sa face ouest et précédé d'un grand degré rectangulaire. Ce vestibule était partiellement encadré de deux chapelles ouvertes uniquement sur la nef et correspondant à la première travée de la nef. La chapelle nord était destinée à accueillir les fonts baptismaux. Le dessin de l'élévation proposé en novembre 1924 (ill.) montre que les murs du vestibule et des chapelles devaient être percés de petites baies carrées.

L'église réalisée n'a pas de vestibule fermé mais un vestibule ouvert d'une baie en plein cintre côté ouest et d'une arcade en plein cintre côté sud par lequel se fait désormais l'accès à l'église (ill.). Ce vestibule conservé le même plan et la même surface que celui précédemment prévu. Toutefois, pour permettre la modification de l'accès, la chapelle sud a été supprimée.

Cette évolution du plan tient sans doute au fait que, sur le plan initial, la distance entre le porche de l'église et les premiers bâtiments situés en vis à vis n'aurait été suffisante ni pour permettre une circulation aisée des fidèles ni pour avoir le recul nécessaire pour créer un parvis mettant en valeur le nouveau clocher-porche.

L'évolution la plus importante concerne cependant le clocher lui-même. Sur les dessins fournis par Gaillard en novembre 1924 (ill.), c'est un clocher classique. En façade, au-dessus de l'arche d'entrée, le bas de la tour est percé de grandes baies verticales qui se poursuivent par des abat-sons. Il est surmonté d'un niveau accueillant une horloge puis d'un petit fronton à redents décoré d'un écusson. Les trois autres faces du clocher présentent une élévation identique et presque similaire à celle de la façade principale. En effet, on retrouve au-dessus d'un premier niveau de murs pleins (et non percé de baies comme sur la façade principale) le niveau des abat-sons, surmonté à son tour d'un niveau accueillant une horloge puis d'un petit fronton à redents décoré d'un écusson. Le clocher est couvert par une flèche rhomboïdale.

Le projet finalement mis en œuvre n'apparaît sur un dessin qu'en juin 1927 (ill.), soit presque trois ans après le premier projet. On y voit la flèche ajourée en béton avec sa base carrée décorée d'une croix celtique et cantonnée des statues d'anges surmontant un pan de mur plein décoré d'un blason couronné entouré de draperies qui est venu remplacer l'horloge.

La réception du projet

Plusieurs commentaires de l'époque de la construction permettent d'avoir un idée de ce à quoi ressemblait l'église. Dans le bulletin paroissial de décembre 1927, le curé dit que "la nouvelle église a gardé de la précédente les dimensions et la disposition générale [...]. C'est surtout par le choix et la mise en œuvre des matériaux que l'église est originale. Il faut la contempler des champs qui s'étendent au-delà du cimetière. De ce point de vue, son harmonieux ensemble vous charmera avec le rose de ses murs, la teinte plus foncée du toit, l'alternance du ciment et de la brique dans la tour et dans les ajours de la flèche. En revenant vers l'édifice, admirez la vie que donnent aux murs les diverses nuances de cette belle brique de Fouquereuil qui les revêt".

Dans un courrier adressé au curé de la paroisse et reproduit dans le bulletin paroissial de mars 1928, Valentine Reyre, qui réalise les vitraux et les décors intérieurs de l'église, partage sa perception de l'espace intérieur : "Tandis que les voûtes de la nef restent baignées d'ombre, la coupole du sanctuaire est ajourée de treize petites fenêtres étroites. Elles placent comme un diadème de lumière au-dessus de l'autel."

Enfin, en juin 1928 après une visite sur place, la commission diocésaine fait part de son avis sur l'église : "À l'extérieur, cet édifice paraît d'une structure bien ordonnée et le clocher où l'on a voulu montrer ce que peut donner l'union de la brique et du ciment, par sa flèche ajourée qui surmonte un saint Martin à cheval d'une belle venue et de lignes bien équilibrées, donne une réelle impression de force et d'élégance" (Bulletin paroissial, juillet 1928, cité par ELALIN, PIETRZAK et JARRELOT, ca 1990).

Les décors portés

Pour les décors portés, la commune fait appel à des artistes relevant du mouvement de renouveau de l'art sacré : Valentine Reyre pour les verrières (IM59003989), les fresques (IM59003988) et les dessins des mosaïques des arcs du clocher-porche réalisées par le Cambrésien Dante Christofoli, le Douaisien Alexandre Descatoire (1874-1949) qui réalise les anges aux angles du clocher et Marcel Bouraine (1886-1948) à qui l'on doit les sculptures de saint Martin en ciment (réalisation de l'entreprise Sorlin) qui ornent le clocher et les chapiteaux à motifs eucharistiques en staff à l'intérieur de l'église. Le marche de gré à gré entre la commune et le sculpteur est signé en janvier 1928. Il perçoit 18 000 francs pour les bas-reliefs et 5 000 francs pour les chapiteaux. Pour ces œuvres, il doit réaliser les maquettes, les moules nécessaires au tirage de la sculpture définitive et en assurer les finitions et la mise en place.

Le marché de gré à gré avec Alexandre Descatoire (1874-1949) est signé en octobre 1927 pour un montant de 15 000 francs. Il précise que le sculpteur doit fournir, en staff, une maquette des statues respectant le plan dressé par l'architecte à la taille 1/2. Ces maquettes sont encore conservées dans l'église. Elles ont servi à la réalisation définitive des statues en ciment par l'entreprise Sorlin, sous la supervision de Descatoire, qui en assure les finitions et la mise en place.

Les modifications contemporaines :

Le bilan sanitaire de l'édifice réalisé par le cabinet d'architecte Bisman en 2017 pour préparer la restauration de l'église permet de préciser les modifications subies par cette dernière, qui se répartissent en deux grandes campagnes.

La première, en 1980, voit le remplacement des verrières de la nef et du transept par des verrières en dalles de verre.

La seconde, en 1994, modifie le clocher-porche : obturation de la baie de la façade ouest, suppression des claustras en béton qui occupaient l'espace ente les baies et les abat-sons sur les façades nord et ouest, ajout d'une rampe PMR le long du mur nord. La consultation des vues aériennes depuis les années 1930 (voir le site Internet Géoportail - rubrique Remonter le temps) montre que, contrairement aux dessins de l'architecte datés de novembre et décembre 1924, l'accès de l'église ne s'est jamais fait par la façade ouest du clocher-porche et que dès la construction, seul a été construit l'accès sur la façade nord. Enfin, en 1997, les tuiles d'origine sont remplacées par des ardoises artificielles.

La campagne de travaux en cours (2023-2025) vise à restituer l'église telle que réalisée par Gaillard : restitution des claustras, pose de tuiles, nettoyage et renforcement des parties en béton armé.

  • Période(s)
    • Principale : limite 15e siècle 16e siècle , daté par travaux historiques , (détruit)
    • Principale : 2e quart 20e siècle , daté par source
  • Dates
    • 1928, daté par source
  • Auteur(s)
    • Auteur :
      Descatoire Alexandre
      Descatoire Alexandre

      Né à Douai (Nord) en 1874 et mort à Marquette-lez-Lille (Nord) en 1949.

      Élève d’André-Louis-Adolphe Laoust à l'École Nationale des Beaux-Arts, il obtient le deuxième second grand prix de Rome en 1902. Il enseigne à l'Ecole Nationale des Beaux-Arts à partir de 1934 et est élu membre de l'Académie des Beaux-Arts en 1939.

      Une grande partie de son œuvre est dédiée aux soldats de la Première Guerre mondiale. Il conçoit à Lille un monument rendant hommage aux colombophiles et aux oiseaux ayant permis les communications pendant la Grande Guerre et réalise en 1937 La Jeunesse, sur l’Esplanade du Trocadéro à Paris. Son style se rattache au mouvement Art Déco.

      On lui doit également le chemin de croix de la cathédrale d'Arras reconstruite après la Première Guerre mondiale.

      Source : Les monuments aux morts - université de Lille 3 : https://monumentsmorts.univ-lille.fr/auteur/15/descatoirealexandre/?elm=12 [consulté le 22 janvier 2024].

      Bibliographie : RAMBOUR, Elsa. Alexandre Descatoire, un sculpteur art déco dans le Nord - Pas-de-Calais. Mémoire de maîtrise soutenu à l'Université de Lille, sous la direction de M. Frédéric CHAPPEY, 2004, 491 p.

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    • Auteur :
      Bouraine Marcel
      Bouraine Marcel

      Né à Pontoise (Val-d'Oise) en 1886, il étudie la sculpture sous la direction de Joseph-Alexandre Falguière à l'École des Beaux-Arts de Paris. Capturé par les Allemands pendant la Première Guerre mondiale, il est interné en Suisse. De retour à Paris, il expose au Salon des Tuileries en 1922. Après des débuts encore imprégnés par l'académisme, Bouraine se révèle dans les années 1925 comme l'un des sculpteurs les plus représentatifs de l'Art déco. Il est membre de la Société des Artistes Français et participe au Salon d'Automne. Il collabore en 1928 avec Gabriel Argy-Rousseau qui lui commande plusieurs sculptures et expose deux sculptures monumentales à l'Exposition Universelle de 1937 à Paris.

      L'essentiel de sa production est faite de statuettes pour lesquelles son sujet de prédilection est la femme, souvent représentée nue.

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    • Auteur :
      Gaillard Ernest-Edouard
      Gaillard Ernest-Edouard

      Né en 1893 à Cambrai (Nord) et mort à Bailleul (Nord) en 1976.

      Après une formation à l'école des Beaux-Arts de Douai où il obtient la médaille d'argent en architecture, il exerce comme architecte à Cambrai à partir de 1920 et devient l'année suivante architecte des communes et des établissements du Nord. Il participe activement à la reconstruction de Cambrai et des villages des environs après la Première guerre mondiale. Il répond à des commandes publiques et privées. Pour ces dernières, il crée un style qui lui est propre où se retrouvent la présence du pignon, l'usage de la brique et l'introduction de motifs décoratifs floraux. En 1928, il est professeur aux écoles académiques de dessin de Cambrai avant d'en exercer la direction. Il devient conservateur du musée de Cambrai en 1930 mais n'obtient son diplôme de l'École du Louvre qu'en 1934. Il est chargé de l'évacuation (en 1939) puis de la réintégration (en 1946) des œuvres des musées du département du Nord. Il est également Vice-président de la société régionale des architectes du Nord. Entre septembre 1943 et avril 1945, il est déporté en Allemagne pour actes de résistance au camp de concentration de Neuengamme puis à Dora-Mittelbau.

      Sources :

      base Léonore : https://www.leonore.archives-nationales.culture.gouv.fr/ui/notice/151967 [consultée le 22 janvier 2024]

      MÉREAU, Mathilde. Cambrai, 1918-1932 : de la Libération à la reconstruction. Cambrai, ville d'art et d'histoire, 2010.

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    • Auteur :
      Sorlin
      Sorlin

      Entreprise de construction active dans le Cambrésis au moment de la première reconstruction.

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      entrepreneur attribution par source
    • Auteur :
      Christofoli Dante
      Christofoli Dante

      Entrepreneur de pavements mosaïques demeurant rue du Château de Selles à Cambrai.

      Actif dans le Cambrésis pendant la première reconstruction.

      On lui doit également les décors de l'église Saint-Géry et du monument aux morts de Flesquières (59), celui du vestibule de la chambre de commerce de Cambrai.

      Source : https://monumentsmorts.univ-lille.fr/auteur/7670/cristofolil/ [consultée le 20 mars 2024]

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      mosaïste attribution par source

L'église reconstruite après la Première Guerre mondiale reprend les fondations de l'église détruite. Elle est située à la périphérie sud du village, en lisière des champs.

Les dimensions intérieures de l'église sont de seize mètres de large pour la nef et de huit mètres pour les bras du transept. La longueur totale de l'église est de trente mètres et celle du transept de vingt-quatre. Le faîte de l'église s'élève à treize mètres et le clocher-porche mesure un peu plus de quarante-deux mètres.

Le plan

D'un seul niveau, l'église a un plan en croix latine (ill.). La nef, qui compte trois travées, est bordée de deux bas-côtés. Le chœur et les bas-côtés s'achèvent par des absides circulaires, tandis que celles achevant les bras du transept sont à trois pans. Dans l'axe du chœur se trouve un clocher-porche de plan carré dont le premier niveau abrite un vestibule. La chapelle baptismale, située à l'extrémité du bas-côté sud derrière le clocher-porche, forme une excroissance rectangulaire par rapport au plan de l'église. La sacristie est située à l'extrémité sud de l'église, derrière le bras du transept dont elle épouse une partie du contour. On y accède depuis l'extérieur par un escalier droit à une seule volée.

L'élévation (ill.) :

- À l'extérieur :

Chaque travée de la nef est scandée par un contrefort ainsi que chaque angle des absides à pans coupés du transept. Aucun contrefort ne vient interrompre le chevet de l'église. La nef et le transept sont couverts par une toiture à longs pans s'achevant par des pignons débordants. Le vaisseau central de la nef et les bas-côtés sont couverts par le même pan de toiture. Les absides, les absidioles et la chapelle baptismale sont couverts par des croupes polygonales.

La campagne de restauration en cours doit remplacer les tuiles artificielles posées en 1997 par "des tuiles plates au petit moule ton orangé pour respecter les dispositions originelles" (BISMAN, 2017).

L'église est construite en brique sur une ossature en béton armé et la charpente est en béton armé (BISMAN, 2017). Les briques, destinées à être vues, sont parfaitement calibrées. Le clocher-porche est construit en brique rouge. Pour le reste de l'église, l'architecte a utilisé des briques de Fouquereuil de couleur jaune-orangée et non uniforme. Les différences de couleur entre les briques du clocher-porche et de la nef s'explique par une différence de cuisson : les plus rouges ont cuit plus longtemps. Ce choix de brique présentant des variations de couleur ainsi que le calepinage de la pose animent les façades de la nef. Les briques sont posées en appareil anglais (alternance sur un même rang de briques posées alternativement en boutisse et en panneresse couchées). Cet appareil est très utilisé entre la fin du XIXe siècle et la Seconde Reconstruction. Sur les façades latérales, sous les appuis des baies, les briques associent un appareil en épis à deux rangs posés en panneresses debout. Ce dernier appareil se retrouve également au-dessus du soubassement et sous la corniche. Sur le chevet, le calepinage alterne pose en appareil anglais, en panneresses debout et en épis dont les coins sont remplis de béton. Contrairement au reste de de l'édifice où les arcs des baies sont en brique, ceux des baies oblongues du chevet sont enduites en béton. Le décor des murs de cette partie de l'église est ainsi beaucoup plus élaboré que celui du reste de l'édifice.

Sur la façade ouest, à gauche du clocher-porche et à la hauteur des baies des bas-côtés, une table rentrante rectangulaire laissée nue est visible.

Les frontons qui marquent les extrémités du transept et de la nef sont couverts d'un rampant en béton et décorés de wambergues en béton. C'est aussi ce matériau qui est utilisé pour la corniche sous l'égout de toit, les chaperons des contreforts et l'enduit du soubassement. Ce dernier est travaillé comme une pierre bouchardée et n'est pas lissé avec un enduit ciment fin comme c'est le cas pour les autres emplacements où le béton est laissé apparent. En structure ou comme élément de décor, le béton est présent dans toute l'église mais seul le clocher-porche l'affiche de manière aussi éclatante : montants des triplets de baies, claustra, flèche ajourée, panneaux de saint Martin et anges décorant les quatre faces.

Le clocher-porche est percé de deux arcs en plein cintre reposant sur des colonnes. Seul celui côté nord, précédé d'un grand degré en pierre bleue (calcaire local dense de couleur gris-bleu), permet d'accéder au vestibule puis à l'église. Le côté ouest est muré. Cette transformation récente ne modifie pas l'accès à l'église qui ne se faisait que par le côté nord du clocher-porche. Sur ces deux façades, au-dessus des arcs, se trouve un triplet de baies en plein cintre qui se déploient jusqu'aux panneaux sculptés. Leur partie basse est occupée par des claustras en béton (remplacés par des châssis aluminium et des verres en 1996 mais restituées en 2023) et la partie haute par des abat-sons en béton. Sur les façades sud et est, les baies sont plus petites et se limitent à la partie des abat-sons. Les contreforts qui cantonnent le clocher s'arrêtent à ce niveau. Au-dessus, sur les quatre faces, se trouve un panneau figuratif en béton moulé. Au-dessus de ce niveau, servant de base à la flèche, quatre panneaux ajourés sont décorés d'une croix celtique tandis que les angles sont occupés par des anges. La flèche reprend le décor de croix celtiques inscrites dans un cadre ajouré dont la taille décroit jusqu'à la pointe de la flèche.

- À l'intérieur (ill.) :

Chaque travée (trois pour la nef et une pour le transept) est percée d'une baie en plein cintre au niveau du collatéral. La nef et les bas-côtés sont couverts d'une voûte en berceau soulignée d'arcs doubleaux. Les absides sont couvertes d'une voûte en cul-de-four. Les voûtes sont réalisées en béton armé (BISMAN, 2017). Murs et voûtes ont été enduits au plâtre. Compte-tenu du fait que les murs étaient destinés à recevoir un enduit, les briques utilisées à l'intérieur de l'église sont de moins belle qualité que celles utilisées à l'extérieur (BISMAN, 2017).

Les grandes arcades (arcatures séparant la nef et les bas-côtés) sont en plein cintre. Tout comme les arcs doubleaux et formerets des bas-côtés, ceux de la nef reposent sur des colonnes octogonales sans base qui reçoivent également les retombées des grandes arcades. Ces colonnes, habillées de panneaux de marbre noir veiné de blanc, n'ont pas de base et s'achèvent par un chapiteau cubique. Réalisés en staff moulé, les chapiteaux sont l'œuvre de Marcel Bouraine. Sur une base décorée d'épis de blés, chaque face porte un décor lié à l'eucharistie : grappe de raisin, agneau mystique, colombe, épi de blé. Les angles sont occupés par des feuilles de vigne stylisées (ill.).

L'ensemble de l'église est peint : un enduit ocre a été posé sur les murs et les voûtes (BISMAN, 2017) auquel viennent s'ajouter les fresques de Valentine Reyre sur les intrados des arcs, dans le chœur, les absidioles et le chemin de croix (IM59003988).

Les décors du clocher :

- Les mosaïques (ill.) :

Situées sur les deux arcs au premier niveau du clocher-porche, elles sont composées de manière identique : sur un fond blanc, un texte court sur la face de l'arc jusqu'aux sommiers occupés par des animaux. Il est encadré par des motifs géométriques en frises (triangles disjoints en haut, frette en bas) et est interrompu par un dessin situé à l'emplacement de la clef de voûte. Sur l'arc de la façade ouest, la phrase "Maison de Dieu porte du ciel" (Genèse 28-17), interrompue par une église, est associée à deux agneaux tête levée et sur celui de l'arc sud deux cerfs broutant encadrent le texte "Puisez l'eau vive aux fontaines du Sauveur" (Isaïe, 12-3) réparti de chaque côté d'une croix latine pattée. Enfin, le haut des colonnes supportant l'arc est décoré d'un chevron.

Les couleurs des tessons associent du rose, de l'ocre, du brun, du gris qui rappellent la couleur des briques et des parties en ciment de l'église, ainsi que quelques touches de vert et de doré, en particulier pour les bordures des lettres et les bois des cerfs.

- Les bas-reliefs en béton armé (ill.) :

Ils occupent l'espace entre les abat-sons et la base de la flèche. Ils sont réalisés en béton moulé et mesurent trois mètre sur trois mètres cinquante (BISMAN, 2017). Ils ne comptent que deux motifs : la Charité de saint Martin sur les façades nord et sud (dus à Marcel Bouraine) et deux panneaux consacrés à la Vierge sur les façades est et ouest.

La Charité de saint Martin est identique à celle représentée sur le panneau décorant le tabernacle de l'autel latéral sud : même composition avec des personnages occupant tout l'espace, même organisation de la composition autour de la diagonale formée par le corps du mendiant et le drapé du manteau de saint Martin qui s'oppose à celle constituée par le corps du cheval, mêmes attitudes et mouvements des personnages et du cheval piaffant, mêmes drapés, même auréole tronquée de saint Martin...

Une Vierge à l'enfant coupée à mi-corps est représentée sur la façade ouest. Deux lions des Flandres occupent l'espace sous la Vierge. Une croix latine pend sous le blason entouré de draperies retenues par des nœuds à une couronne héraldique de comte située au-dessus du blason. La composition est assez similaire sur la façade est, dédiée au blason de la ville : une Vierge à l'enfant assise sur un trône est au centre d'un blason, sous le nom de la commune "Fontaine NE Dame". Le blason est bordé par des feuilles de laurier enrubannées formant un drapé qui retombe de chaque côté du blason et couronné par deux rameaux de feuilles de chêne entrecroisés.

Pour tous ces panneaux, l'utilisation de formes géométriques, la simplification des volumes rattachent le style des panneaux à l'Art déco.

- Les anges (ill.) :

Ils cantonnent le clocher à la base de la flèche. Leur taille est identique à celle des panneaux décorés d'une croix celtique qui constituent le premier niveau de la flèche et avec lesquels ils sont disposés en alternance. Réalisés en béton d'après le même moule, tous sont identiques. Présentés debout, la tête couverte de grosses boucles et inclinée vers les mains jointes à hauteur de poitrine, ils sont vêtus d'une tunique au bas décoré d'un chevron dont dépasse une aube plissée. Les ailes sont plaquées sur les angles de la flèche et descendent, en s'évasant légèrement, jusqu'au bas de la statue. Elles sont décorées de motifs qui rappellent les plumes. Ces motifs sont réalisés avec des cannelures épousant la courbure extérieure de l'aile et sont rythmés par des ressauts. Ces cannelures sont identiques à celles utilisées pour le plissé de l'aube.

De nouveau, la simplification des volumes comme celle du traitement des traits du visage, la forme très longiligne et sans mouvement de la silhouette donnent aux anges un côté très hiératique typique de la statuaire Art déco.

  • Murs
    • brique maçonnerie parement
    • béton
  • Toits
    tuile plate
  • Plans
    plan en croix latine
  • Étages
    3 vaisseaux
  • Couvrements
    • voûte en berceau plein-cintre, en béton armé
    • cul-de-four
  • Couvertures
    • flèche en maçonnerie toit à longs pans pignon découvert
    • croupe polygonale
  • Typologies
    Art déco
  • Techniques
    • mosaïque
    • sculpture
    • peinture
  • Représentations
    • ange
    • saint Martin
    • Vierge à l'Enfant
    • agneau, cerf
  • Statut de la propriété
    propriété de la commune

Documents d'archives

  • AD Nord. Série Z, Fonds des sous-préfectures ; Sous-série 3 Z, Fonds de la sous-préfecture de Cambrai : 3 Z 58. Fontaine-Notre-Dame : Travaux communaux - Réfection, construction : église (architecte Gaillard) : gros-œuvre, clocher, vitraux, mobilier cultuel (1923-1935).

    Plans et photographies
  • Commune de Fontaine-Notre-Dame, service patrimoine. Église Saint-Martin de Fontaine-Notre-Dame, diagnostic de l'édifice, 15 mars 2017. Dossier établi par François BISMAN, architecte du patrimoine.

  • Commune de Fontaine-Notre-Dame, service patrimoine. Monographie de Fontaine-Notre-Dame, [ca 1990]. Document établi par DELALIN, Isabelle, PIETRZAK, Pierre et JARRELOT, Christian, historiens locaux.

    pp. 103-120.
  • AD Nord. Série O, Administration et comptabilité communale ; sous-série 2 O, dossiers d'affaires communales 1800-1940 ; 2 O 240-130. Fontaine-Notre-Dame. Voirie - Plan général d'alignement et de nivellement, 1922.

  • AD Nord. Série O, Administration et comptabilité communale ; sous-série 2 O, dossiers d'affaires communales 1800-1940 ; 2 O 240-120. Fontaine-Notre-Dame. Travaux - église, reconstruction 1925-1926.

    AD Nord : 2O240-120
    Projet de reconstruction de l'église : plans, élévations, coupes pour l'église et le clocher, signés de l'architecte et datés de 1924 et 1927.
  • A Évêché Cambrai. Série 7L : commission d'art sacré ; sous-série 7L 01 : fonds de la commission diocésaine d'art sacré ; 7L 01.75. Mobilier de l'église Saint-Martin de Fontaine-Notre-Dame [courrier de l'architecte à la commission et photographies], 1928.

    A Évêché Cambrai : 7L.01.75

Bibliographie

  • GAILLARD, Ernest, architecte. L'église de Fontaine Notre-Dame près de Cambrai (Nord), 1928.

    [Mention apportée par l'auteur à la fin du recueil : "J'ai recueilli des photographies en témoignage de reconnaissance et en souvenir de mon ancien maître Jules Leroux, professeur à l'École des Beaux-Arts de Douai, mort pour la France en 1915 - Cambrai, avril 1929".]

    A Évêché Cambrai : 7 L 01.75
    Recueil de photographies prises par l'architecte à la fin du chantier, précisant les noms de tous les intervenants du chantier.

Documents figurés

  • Fontaine-Notre-Dame. Plan cadastral. Tableau d'assemblage, 1825 (AD Nord ; P31/842).

    AD Nord : P31/842
  • Fontaine-Notre-Dame. Plan cadastral, 1825 (section C, troisième partie) (AD Nord ; P31/842).

    AD Nord : P31/842
  • Musée de la Chartreuse, Douai. Photothèque Augustin Boutique-Grard. Vues de l'église Saint-Martin de Fontaine-Notre-Dame avant 1914.

    Musée de la Chartreuse Douai : PH 749 à 754
    Vues réalisées par le photographe douaisien Augustin Boutique : côtés et façade de l'église, nef.

Annexes

  • Les textes juridiques encadrant la première reconstruction : Charte des sinistrés, loi Cornudet et loi relative aux coopératives de reconstruction.
  • Biographie détaillée de Valentine Reyre, peintre et peintre-verrier (1889-1943).
Date(s) d'enquête : 2023; Date(s) de rédaction : 2023
(c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
Girard Karine
Girard Karine

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France.

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