Le développement urbain
Le développement de la ville a été conditionné par son caractère défensif (château, enceinte urbaine) et les voies de circulation formées par l’Oise et ses canaux. La ville ancienne se déploie le long de trois artères : la rue Chantraine, au pied du château, la rue de la Citadelle, menant au château et la rue de la Ville (actuelle rue Camille-Desmoulins), ouverte sur le canal des Moulins par la porte des Poissons ou de l’Horloge qui servait de beffroi communal. Le marché se tenait sur la place du Tocquet, à l’intersection des trois voies.
En 1583, l’enceinte est avancée jusqu’à l’Oise où la porte du Grand-Pont ouvre la route de La Capelle. Entre les bastions de la Buse et du Mont-Éventé, elle inclut désormais le « Grand Faubourg », qui se développe surtout à partir du milieu du 17e siècle autour de la place d’Armes ponctuée d’une croix de grès et de la halle aux grains, et sur laquelle les notables font ériger de vastes demeures. La ville présente une séparation assez marquée entre le cœur ancien, au bâti dense et aux rues étroites, et les faubourgs et les nouveaux quartiers gagnés sur le glacis de l’ancienne enceinte ainsi que sur les espaces intermédiaires, entre les axes de développement sur lesquels ont prospéré le faubourg de Villers ou Saint-Médard, sur la route de La Capelle, et le faubourg de Flandre ou Saint-Lazare, sur la route de Landrecies. La trame urbaine se tisse de façon très linéaire le long des axes de circulation, et seul le le projet non abouti de caserne de cavalerie, en 1787, faisait montre d’un réel souci d’aménagement urbain.
La ville médiévale
La rue de la Citadelle a formé dès le Moyen Âge le quartier religieux de la ville. Face à l’église paroissiale se dressait l’ancien hôtel-Dieu, mais on ignore l’emplacement de la communauté de Béguines, dotée par Jean de Châtillon en 1268 et disparue probablement au début du XIVe siècle.
Afin de lutter contre les progrès de la religion protestante dans la région, Charles de Lorraine favorise l’installation d’une communauté de Minimes en 1610 à proximité des établissements religieux, mais hors des murs de la ville. En 1680, Marie de Lorraine, duchesse de Guise, décide la reconstruction de l’hôpital dans un faubourg de la ville et la création de deux écoles tenues par les frères des Écoles chrétiennes et les sœurs du Saint-Enfant-Jésus pour l’instruction des enfants pauvres.
La ville moderne
La Révolution française prive Guise de ses prérogatives administratives au profit de Vervins, chef-lieu du nouveau district devenu arrondissement. En 1793, l’ancienne cité ducale prend pour quelque temps le nom de « Réunion-sur-Oise ». Le simple chef-lieu de canton s’étend au 19e siècle hors de l’enceinte urbaine détruite peu à peu. Entre 1847 et 1849 disparaissent les dernières murailles ainsi que la porte Chantraine et la porte du Grand Pont, surmontée du beffroi transféré de la porte des Poissons détruite en 1793. La grange aux dîmes est également détruite en 1862. Jusqu’au 20e siècle, l’ensemble du bâti offre un aspect très linéaire le long des principales voies, et seule la place Lesur avec le groupe scolaire, aménagés en partie à l’emplacement de l’ancienne enceinte urbaine et de son glacis, propose au milieu du 19e siècle un espace public monumental digne d’une ville moderne, sur le site pressenti au siècle précédent pour la caserne de cavalerie.
Mais le véritable essor accompagne la révolution industrielle. L’installation en 1846 de la fonderie Godin, complétée à partir de 1859 par l’extraordinaire ensemble du Familistère – qui forme par sa structure comme par son organisation économique et sociale une ville dans la ville – puis de la filature Cau en 1878, procure à la ville une activité sans précédent, et une large expansion vers le nord sur les faubourgs de Cambrai, de Robbé et de Landrecies.
Les deux batailles de Guise en août 1914 et novembre 1917 touchent essentiellement les rues Chantraine et Camille-Desmoulins, et anéantissent le château dont ne subsistent que le donjon et l’enceinte de brique. Les destructions, très localisées, permettent toutefois le percement de la rue Alfred-Chollet entre la place d’Armes et la place Lesur, qui crée une véritable perspective urbaine. L’architecte Jean Canonne intervient dans la reconstruction de nombreux édifices publics ou privés. Le développement de la ville au 20e siècle confirme le mouvement du siècle précédent : des cités ouvrières voient le jour le long des grands axes de circulation et des lotissements sont créés dans les faubourgs de Robbé (Cité Neuve, 1911 et années 1950), Chantraine et de Villers (années 1950-1960), où est également établi le nouvel hôpital au début des années 1960. L’effondrement d’une partie de l’enceinte ouest contraint en 1957 les pouvoirs publics à détruire presque toutes les maisons situées sur le côté pair de la rue Chantraine. En 1966, l’ancien village de Flavigny-le-Petit, situé dans le prolongement du faubourg de Chantraine, ainsi que le quartier de Madagascar, séparé de la commune de Lesquielles Saint-Germain, sont rattachés à la ville de Guise.
La ville industrielle
Dès le 15e siècle, les canaux de l’Oise sont aménagés pour alimenter les deux moulins. En 1662, le Conseil d’État autorise le duc de Guise à canaliser l’Oise pour favoriser l’exploitation et le flottage des bois des forêts du duché et l’établissement de forges et de verreries. Aux 17e et 18e siècles, le quai du Vieux Moulin, en bordure du Grand Faubourg, regroupait une grande partie de l’activité artisanale de la cité : moulins à tan et à foulon, filature, tannerie, brasserie.
À partir du milieu du 19e siècle, les industries s’installent pour la plupart dans les faubourgs desservis par le chemin de fer à partir de 1875. Le vaste espace disponible permet également d’aménager des ensembles d’habitat ouvrier plus ou moins organisés à proximité des lieux de travail, que nécessite une importante activité. Les rues André-Godin et Sadi-Carnot accueillent plusieurs cités en impasse où deux pavillons symétriques commandent deux alignements parallèles de petites maisons identiques, comme la cité Chassagne, datée de 1921.
Chercheur de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, région Hauts-de-France.